OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Comment fonctionnent les “Digital Natives”? http://owni.fr/2011/03/18/comment-fonctionnent-les-digital-natives/ http://owni.fr/2011/03/18/comment-fonctionnent-les-digital-natives/#comments Fri, 18 Mar 2011 07:30:28 +0000 Chloé Nataf http://owni.fr/?p=31182 Chloé Nataf écrit pour Hors-Sillon, un blog rattaché à Trempolino, centre de ressources, formation et d’expérimentation pour les musiques actuelles basé à Nantes. Elle a décidé d’approfondir une notion évoquée par Gilles Babinet (voir ci-dessous) lors d’une interview réalisée par OWNImusic, les “Digital Natives”.

Suite à l’interview de Gilles Babinet (entrepreneur français connu pour le MXP4 entre autre) au moment du Midem 2011 par Owni Music, je me suis penchée sur les « digital natives »:

Cliquer ici pour voir la vidéo.

LES DIGITAL NATIVES : C’EST QUI?

Selon Wikipedia, un digital native ou en français le natif numérique: “est une personne ayant grandi dans un environnement numérique comme celui des ordinateurs, internet, des téléphones mobiles et des baladeurs MP3″.

Ils ont donc environ 14/15 ans maximum, et ce sont eux qui consommeront la musique demain. Pour illustrer l’ampleur du phénomène je vous invite à voir cette vidéo de la petite Clémentine, 20 mois, avec un IPad et un IPhone…

Nota-bene: une variante au natif numérique existe, à savoir l’immigrant numérique (digital immigrant) qui est « un individu ayant grandi hors d’un environnement numérique et l’ayant adopté plus tard. Un natif numérique parlera de son nouvel «appareil photo» là où un migrant numérique sera fier de son nouvel «appareil photo numérique». » (source Wikipedia)

ET CONCRETEMENT COMMENT CES DIGITAL NATIVES FONCTIONNENT-ILS ?

En 2009, les équipes digitales de l’agence webmarketing JWT Paris, ont lancé une vaste étude ayant un objectif simple : comprendre si le digital avait eu un impact sur le comportement de ces digital natives. Les résultats sont sans appel : le digital est LA cause de changements de comportements profonds au sein de cette population.

L’agence a appelé cette étude “Empreintes Digitales”. Huit empreintes qu’il faut comprendre pour savoir décortiquer les réactions de ces publics. JWT Paris n’a pas fait cette étude pour le plaisir, mais pour remettre en adéquation ses actions marketing qui trop souvent n’ont pas réussi à suivre le même rythme et qui faute d’outils n’avaient pas les moyens de le faire.

Résumé de l’étude:

EMPREINTE 1: Le « Power of Now »

Cette génération veut tout, tout de suite et partout. Les « digital natives » ne supportent pas d’attendre. La BBC a estimé à 9 secondes, la tolérance à l’attente sur le web (pensez-y… au-delà, on trouve que notre connexion « rame »…).

72% des 12-25 ans déclarent ne pas pouvoir se passer d’internet pendant une journée. Sur internet, on peut tout avoir tout de suite, du coup, dans le réel il faut que ça soit pareil.

Conclusion : la communication change. SIMPLE, RAPIDE, EFFICACE. Le temps se raccourcit, les messages doivent se raccourcir car l’immédiateté prime avant tout…

EMPREINTE 2: Pas de loi pour m’interdire

L’avènement de Chatroulette en 2010, la censure de 32000 photos/jour sur skyblog, les apéros géants… il n’y a plus de limite aux interdits qui finalement ne sont là que pour être remis en question.

Il n’y a plus de limite et les digital natives s’en rendent compte et 82% d’entre eux demandent une autorité plus forte de la part de leurs enseignants.

Le « digital native » fait des choix tranchés et ne veut plus d’une relation purement marchande. Les marques l’ont bien compris et jouent un rôle essentiel dans le message qu’elles adressent à cette génération. Avant de vendre, il faut apprendre à offrir et du coup, elles offrent une expérience qui alimentera l’imaginaire du digital native, tout en leur vendant des chaussures ou de la musique.

EMPREINTE 3: Etre « Moi m’aime » avec mes semblables

L’internet, c’est l’ouverture sur le monde, rencontrer des gens, découvrir plein de choses…. ouais, ouais, ouais… c’est surtout la possibilité de rencontrer des personnes qui ont les mêmes affinités que SOI, la possibilité d’exposer SA vie privée, de mettre en scène SA vie, d’avoir un blog sur SOI (sic!), de chatter en direct avec SES amis… internet c’est finalement un monde assez narcissique ou tout tourne autour d’individu, d’où l’explosion des réseaux sociaux et d’un métier à la mode en communication : le community manager.

Ce dernier doit s’immiscer dans les réseaux sociaux, prêchant la bonne parole d’une marque, et récoltant les informations les plus précises possibles sur les potentiels acheteurs.

EMPREINTE 4 : Je sais tout

65% des digital natives ont pour source d’information internet. En un clic, une pression du doigt, on a sa réponse. Cette information n’est pas sans risques, puisqu’elle n’est pas la plus fiable. Mais les informations venant d’une « communauté amie » sont souvent prises pour argent content… La vérité vient du web… Du coup, les professeurs, les hommes politiques, doivent se mettre à la page et doivent savoir, être exacts dans leurs réponses, car tout est vérifié et tout est contestable.

Un monde où l’information est donc détenue également par toutes et tous, et où les références (l’autorité) ont disparu. Un monde où beaucoup de marques tentent de naviguer en tutoyant, en parlant à la deuxième personne du singulier: « you ». Un comportement de surface qui est voué à rester au mieux totalement ignoré, au pire source d’inspiration pour devenir la cible d’attaques.

A ce narcissisme du public, il faut répondre différemment. Par l’interaction. Un dialogue qu’il est possible de nourrir en offrant des clefs pour comprendre le monde qui entoure les digital natives, en les encourageant à le découvrir.

EMPREINTE 5 : Concentré d’émotions

Il existe plus de 240 millions de sites web, quasi autant de blog, 150 millions de vidéos youtube et le temps moyen passé sur un site est de 56 secondes… Pour attirer l’attention, il faut que ça soit fort, tout de suite.

D’un point de vu marketing, il faut étonner, époustoufler ou faire rire car en provoquant ces émotions, les marques redeviennent source de plaisir et créent l’acte d’achat.

EMPREINTE 6 : L’éloge du raccourci

Une moyenne de 60 à 80 SMS/jour, des abréviations, un langage phonétique, twitter et ses 140 signes, les statuts facebook… L’attention est limitée, donc le langage se raccourcit. Cette empreinte est primordiale car non seulement elle montre l’importance des accroches courtes et percutantes, mais redéfinit également la façon qu’ont les digital natives de consommer leur relation aux autres: moins de rapports directs ou alors très rapides.

CONCLUSION : les messages doivent être ultra simplifiés. Dépasser les mots pour se faire plus sensoriels. Anticiper les sensations qu’elles soient olfactives, tactiles, auditives ou gustatives permet la projection créant un désir d’achat.

EMPREINTE 7 : Du gratuit, du gratuit

Le digital, c’est l’avènement du gratuit. Tout est à porté de main gratuitement que ça soit légalement ou illègalement. C’est magique et c’est devenu une mode. Pour créer des formules marketing à succès plusieurs possibilités:

- L’expérience sans engagement, la possibilité de sortir d’un contrat à tout moment, le satisfait ou remboursé…

- La récompense immédiate pour une attention prêtée, la fidélité…

- L’impossible devenu réalité. Comme la marque H&M rendant accessible financièrement des grands couturiers…

EMPREINTE 8 : Le consopouvoir

Le consommateur a pouvoir de vie ou de mort sur un produit, car il a non seulement la possibilité de se renseigner via les réseaux sociaux et internet, mais également de dénoncer un produit mal conçu, ou un service inadapté ou non performant. Si les consommateurs ont ce pouvoir, il sont aussi le pouvoir inverse, celui de promouvoir un produit! Etre infaillible, sûr de son produit et s’appuyer sur un réseau, qui va promouvoir notre produit. Le consommateur fait plus confiance à ses amis qu’à une publicité vue sur le net.

Voilà pour l’étude sur les digital natives. Elle a sûrement une durée dans le temps, car les choses évoluent très vite. Ceci dit, il s’agit d’une bonne base marketing qui peut être appliquée à la musique, pour le rapport artiste/public, car n’oublions pas que les consommateurs de demain sont les digital natives d’aujourd’hui…

Nous vous recommandons de regarder “Google D.C. Talks: Born Digital

Article initialement publié sur: Hors-Sillon

Crédits photos CC flickr : pichenettes, Gidon Burton, verbeeldingskr8, sarahamina

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Qui sont les digital natives? http://owni.fr/2010/11/14/qui-sont-les-digital-natives/ http://owni.fr/2010/11/14/qui-sont-les-digital-natives/#comments Sun, 14 Nov 2010 15:29:59 +0000 Cecil Dijoux http://owni.fr/?p=33866 Probablement dans le but de se rassurer, on parle souvent d’usages lorsque l’on évoque l’avènement du web. A mon sens, il s’agit d’un understatement important qui entretient une certaine incompréhension. La relation au web a développé une culture forte avec ses principes, des valeurs et des habitudes.

En cela, les Digital Natives disposent d’un ADN tout autant révolutionnaire, bien que moins spectaculaire, que la génération des baby-boomers.

Cette Génération Y présente des caractéristiques culturelles qui causent d’épineux problèmes au sein de l’entreprise en particulier au niveau de la propagan… erm… communication interne.

Nous avons ici à faire avec des travailleurs de la connaissance, post-idéologiques,  sur-éduqués, sur-informés et irrévocablement connectés. Bref : une génération à qui il va être difficile de faire ingurgiter le corporate BS.

Quelques pistes pour faciliter cette communication…

Travailleurs de la connaissance

Même si le terme de Peter Drucker date de 1959, les Digital Natives semblent être la première génération à l’avoir assimilé de manière aussi naturelle et radicale.

La conséquence, que n’a pas omis de préciser Drucker, et qui est complètement intégrée dans la psyché des Digital Natives : si comme le disait fort justement Marx les ouvriers sont aliénés dans leur relation au patronat parce qu’ils ne possèdent pas les outils de production, il n’en n’est pas du tout de même pour les travailleurs de la connaissance : leur outil de production est leur savoir.

Drucker continue en expliquant que c’est la raison pour laquelle l’entreprise ou l’organisation a bien plus besoin du travailleur de la connaissance que l’inverse. Il s’agit là d’un changement radical dans la nature de la relation entreprise-employé.

Solution pour la communication d’entreprise : éliminer le postulat de subordination dans la relation avec l’employé pour instaurer une relation d’échanges réciproques et équilibrés.

Post-idéologique

S’il est bien un point sur lequel la génération connectée diffère des précédentes c’est celui-là.

La génération des boomers restera celle de l’adolescence de l’homme moderne. Une génération dont on se rappellera plus pour avoir fait les idiots tous nus à consommer des substances illégales en proclamant du Debord de San Francisco à Paris que pour ce qu’ils sont devenus (publicitaires, patrons de média etc … bref : la tête de pont de la société du spectacle).

Par bonté d’âme on se gardera de porter un jugement sur le legs de la Génération suivante (GenX), dont je suis et qui n’aura su se dépêtrer de l’ombre envahissante de la précédente.

Bref : tout ce joli et salvateur bazar aux fondements très à gauche a donné naissance d’une part à la contre-culture, avec les conséquences que l’on sait. De l’autre, en réaction (ou dans la continuité cela dépend des perspectives) cela a nourri une idéologie libérale particulièrement aiguisée.

Les Digital Natives quittaient l’enfance lorsque le mur de Berlin est tombé et entraient dans l’age adulte lorsque les tours jumelles se sont effondrées. Ils assistent donc en direct, en l’espace de 10 ans aux fins du communisme et de la croyance démocratie + économie de marché = paix universelle.

Durant leur études ils voient la Chine Maoïste devenir l’allié objectif de l’oncle Sam dans une mondialisation effrénée. Enfin ils entrent sur le marché du travail avec la crise des Subprimes et assistent en direct là encore, au désaveu de l’oracle des marchés, stupéfait et incrédule devant l’insatiable avidité de financiers livrés à eux-même.

Voilà donc une génération qui est génétiquement immunisée contre les belles paroles, les grand élans lyriques et les vues de l’esprit.

En conséquence, les Digital Natives sont post-idéologiques et foncièrement pragmatiques. Ils ne croient qu’en ce qui marche. Et la seule réalisation remarquable et indiscutable que cette génération a vu en direct se mettre en place et grandir avec elle est le Web.  God Bless http.

Solution pour la communication d’entreprise : intégrité : accorder ses paroles avec ses actes. Et échanger des valeurs pompeuses contre des principes clairs et faciles à mettre en œuvre.

Sur-éduquée

Nous inspirons le monde, nous expirons du sens (Salman Rushdie)

Si l’on regarde les courbes d’évolution des diplômes dans l’OCDE sur les 20 dernières années on constate que le nombre des diplômés du supérieur a doublé.

Cela a deux conséquences directes. D’une part une évolution permanente du savoir. En effet, plus de personnes formées et diplômées travaillent sur des domaines de connaissance donnés, et plus le territoire couvert par le savoir augmente. C’est mécanique. Ce qui implique le besoin de se former en permanence : il s’agit là d’une demande forte de la génération Y.

La seconde est que la clef de la survie dans le monde connecté réside dans la capacité à faire sens de l’océan d’information dont on dispose : dans la capacité de synthèse plutôt que dans l’appropriation d’un savoir.

Ce qui, a bien y réfléchir nous rapproche de l’étymologie du mot intelligence :

le latin intelligere : inter (entre) et legere (cueillir, choisir, lire). Qui dit intelligence implique la notion de choix (faculté d’analyse et de sélection). Il faut savoir trier, mais aussi rassembler.

Ainsi, si l’expertise (la maîtrise intégrale d’une partie de savoir) est le gage de la job security ou de la reconnaissance pour la Génération X, il ne s’agit là que d’efforts inutiles pour les Digital Natives. Le savoir est bien trop vaste et évolue bien trop vite  pour se l’approprier. Ce qui importe est de savoir y naviguer pour faire du sens. On retrouve ici une notion clef évoquée par David Weinberger dans son essai The Hyperlinked Organisation du Cluetrain Manifesto.

Solution pour la communication d’entreprise : Axer sa stratégie de communication sur une aptitude à gérer le changement plutôt que sur des grands plans quinquennaux dont tout le monde sait (et les GenY le diront ouvertement) qu’ils ne servent à rien si ce n’est rassurer le management.

Connectée et sur-informée

Digital Natives = indigènes du numérique. Qui ont grandi dans un environnement perpétuellement connectés au contact du plus formidable outil de partage de la connaissance qu’ait connu l’humanité : le web.

Et cet outil ils le maitrisent mieux que quiconque. Ils ont ainsi pris la sale manie de vérifier l’authenticité des informations qui leur sont communiquées.

Si pour la génération aux commandes (X, Baby boomers) la vérité réside au cœur de l’entreprise (intranet, mails officiels, radio moquette) et doit être contrôlée, pour cette génération la vérité est sur le web : immensément plus vaste et est bien évidemment incontrôlable.

Dans l’introduction de son livre sur le sujet, Andrew “M. Entreprise 2.0″ McAfee raconte cette anecdote au sujet de Wikipedia. Grandement dubitatif quant à notre propension à collaborer pacifiquement pour construire le savoir, McAfee est allé voir la définition du mot Skinhead, terrain propice s’il en est à l’application de la Godwin’s Law. Et là il a trouvé la description la plus objective, documentée et dépassionnée du mot et de ses connotations politiques, musicales, culturelles, etc …

Habituée à Wikipedia cette génération a développé un goût immodéré pour la vérité objective et, au delà, pour la conversation et les échanges qui y amènent.

Solution pour la communication d’entreprise : dire les choses telles qu’elles sont et affronter la réalité telle qu’elle est, même si cela doit heurter des susceptibilités.

Confiants, assertifs et malheureux

On ne peut parler de cette génération sans évoquer le remarquable essai de Jean Twenge : Generation Me qui explique Why today’s young americans are more confident, assertive, entitled and more miserable than ever.

Il s’agit là, en particulier aux États-Unis, d’une conséquence de l’importance accordée à l’estime de soi dans l’éducation, importance qui a provoqué de terribles dégâts. Nous nous retrouvons ainsi avec une génération à qui on a expliqué durant toute leur éducation qu’ils pourront faire ce qu’ils souhaitent de leur carrière professionnelle. Le choc lors de l’arrivée en entreprise est d’autant plus rude.

Article publié initialement sur #Hypertextual sous le titre: “Digital Natives vs. Corporate B.S”

Illustrations FlickR CC : Dolinski, Lizette Greco, Stéfan, digitalpimp

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Le plagiat dans la culture du partage http://owni.fr/2010/07/28/le-plagiat-dans-la-culture-du-partage/ http://owni.fr/2010/07/28/le-plagiat-dans-la-culture-du-partage/#comments Wed, 28 Jul 2010 16:01:30 +0000 Emmanuelle Erny-Newton http://owni.fr/?p=22878 L’Ontario vient de faire l’acquisition du programme Turnitin de détection du plagiat, lequel sera opérationnel dans toutes les écoles publiques de la province à l’automne prochain. Cette mesure est destinée à aider dans leur tâche les enseignants, pour qui le plagiat chez les élèves est un enjeu qui prend de l’ampleur.

Cependant, Turnitin est loin de faire l’unanimité : il a déjà été refusé par certaines universités canadiennes (Mount Saint Vincent University, Ryerson University). En effet, ce programme propriétaire fonctionne notamment en consignant les examens et dissertations des étudiants dans une base de données permettant, certes, la détection du plagiat, mais en violant de fait le droit d’auteur de ces élèves.

De plus, le fait de soumettre systématiquement les devoirs au « détecteur » dénie aux élèves la présomption d’innocence.
David Boucher, de la Commission de l’éthique de la science et de la technologie du Canada, note dans son document de synthèse Le pl@giat électronique dans les travaux scolaires : « (…) fait intéressant, voire troublant, deux universités énoncent explicitement que tout étudiant soupçonné de plagiat est présumé coupable jusqu’à ce qu’il fournisse la preuve du contraire . Il s’agit d’un renversement par rapport à la tradition juridique et d’une situation qui soulève un enjeu éthique ». Nota : les deux universités sont L’Université Laval -voir article 28, alinéa b de son Règlement disciplinaire- et l’Université McGill -voir son Guide des droits et obligations de l’étudiant-.

L’utilisation de Turnitin dans les écoles risque donc d’envoyer un message pour le moins embrouillé quant aux valeurs promues par l’éducation publique. Est-ce réellement comme cela que l’on compte « remettre les élèves dans le droit chemin » ?

Le paradoxe scolaire

Comment définiriez-vous un plagiaire ? Diriez-vous que c’est quelqu’un qui recopie mot à mot un passage sans citer d’où il vient ? Dans ce cas, ma fille de 10 ans est plagiaire : je l’ai trouvée il y a quelques temps en train de recopier, pour l’école, un paragraphe de Wikipédia ; je précise qu’elle faisait ça studieusement, avec papier-crayon, et la langue pendant du côté où penche sa tête.
Nota : « la langue pendant du côté où penche sa tête » est une très jolie expression, mais je ne suis pas sûre qu’elle soit de moi. Peut-être de Marcel Aymé, dans Les contes du chat perché. A tout hasard, je préfère me couvrir…

Peut-être l’exemple de ma fille n’est-il pas tout à fait typique de ce qu’est le plagiat : en effet, elle ne plagiait pas intentionnellement. Le vrai plagiaire est celui qui s’approprie, en toute connaissance de cause, des idées qui ne sont pas de lui.
Jean de Lire, chargé de mission à la Cellule Cyberécole de l’Administration de l’Enseignement de la Communauté française (Belgique) fait une réflexion intéressante à ce sujet :

Le tout est de savoir où commence le plagiat. Car qui dit plagiat dit bénéfice, en l’occurrence pour l’élève. Or s’inspirer de données, qu’elles soient en ligne ou non, pour reconstruire un thème, sachant qu’on ne l’a pas inventé, c’est ça l’école.

L’école, avec son socle de connaissances, encourage la rétention de notions et d’idées venues du passé. De là, la valeur accordée à la pensée originale de l’élève est subordonnée à celle d’un Spinoza ou d’un Kant. L’école, c’est dans une large mesure le règne de la pensée d’emprunt. Le plagiat y est donc, sinon légal, du moins « aligné idéologiquement ». Lorsque j’ai expliqué à ma fille qu’il vaudrait mieux qu’elle réécrive le passage de Wikipédia dans ses propres termes, elle m’a répondu : « Pourquoi ? C’est beaucoup mieux écrit ici ! »

"C'est du plagiat. Si cela se reproduit, vous serez exclu de notre université"

Les raisons du plagiat

Cette réflexion nous invite à nous poser une question à mon sens vitale, si l’on veut régler en profondeur le problème du plagiat : pourquoi l’élève plagie-t-il ?
Or, fait significatif, si les études quantitatives sur le plagiat ne manquent pas, je n’ai pas réussi à trouver de recherches qualitatives sur les causes du plagiat.

Dans son article publié sur Profweb, Nicole Perreault mentionne intuitivement plusieurs raisons pour lesquelles les élèves plagient : la méconnaissance des normes reliées à la citation des sources –c’est là que se situe ma fille, et c’est aussi là où se situent bon nombre d’étudiants, selon Michelle Bergadaà, spécialiste de la question. La réponse à cela est relativement simple : enseigner aux élèves comment citer leurs sources.

Une autre raison serait de gagner du temps : dans cette rubrique, Nicole Perreault cite notamment deux étudiants : l’un déclare « nous sommes obligés de frauder un jour ou l’autre afin de respecter le temps dont on dispose », alors que l’autre avoue « tout est sous la main, alors pourquoi se fatiguer? ». Ces deux raisons avancées pour justifier le plagiat sont fort différentes :

« Nous sommes obligés de frauder un jour ou l’autre afin de respecter le temps dont on dispose » pose la question des exigences qui pèsent sur les étudiants. Sir Ken Robinson décrit avec justesse l’inflation des diplômes qui caractérise notre époque. Il y a quarante ans, tout diplôme d’études supérieures vous assurait un bon emploi. Aujourd’hui, il faut viser le doctorat pour se distinguer de ses contemporains. La prolongation des études, alliée à la crise économique, oblige de nombreux étudiants à travailler parallèlement à la poursuite de leurs études. La raison invoquée ici pour expliquer le recours au plagiat est liée à la situation socio-économique des étudiants, et à la charge de travail que l’institution leur impose. S’attaquer à ce point est une tâche d’envergure, qui ne risque pas d’être réglée demain, et qui dépasse largement le cadre du plagiat pour toucher à celui de la reproduction sociale de l’éducation.

« Tout est sous la main, alors pourquoi se fatiguer? » est un aveu de fainéantise. Cependant, chacun sait d’expérience que la fainéantise n’est pas un trait de caractère : elle dépend du contexte. Qui aurait recours au plagiat pour répondre à une question qui le/la passionne ? Les devoirs scolaires se prêtant bien au plagiat ont des thèmes bateau, souvent à cent lieues des intérêts des élèves. Pour minimiser le risque de plagiat, il s’agit donc de poser aux élèves des questions sur lesquelles ils ont une opinion, ou sur quoi ils verront l’intérêt de réfléchir.

Mais ce n’est pas suffisant. Car soyons honnêtes : même si un enseignant demande l’opinion de l’élève dans une dissertation argumentative, c’est avant tout pour satisfaire au cursus, pas par réelle envie de connaître son point de vue. Dans son article Four Reasons to Be Happy About Plagiarism, Russell Hunt déclare : « Je ne suis pas convaincu que nous puissions résoudre le problème (du plagiat) en assurant aux étudiants qu’ « ils ont quelque chose de significatif et d’important à dire » (…) On ne peut dissocier (…) ce qu’on a à dire de ceux à qui on le dit, ni de la raison pour laquelle on le dit ». (traduit par le rédacteur). En d’autres termes, poser des questions pour lesquelles les élèves ont des opinions n’est pas en soi suffisant, encore faut-il écouter leurs opinions.

La génération X devrait se souvenir des moments passés sur les bancs de l'école

Valeurs et cultures

On peut bien dire ce qu’on veut, soutiendront certains : le plagiat ne respecte pas la propriété intellectuelle, c’est donc un acte immoral. La tendance, dans les milieux scolaires, est donc à faire comprendre, « de l’intérieur », à la jeune génération, que, plagier, c’est mal. Typiquement, on posera la question « comment vous sentiriez-vous si quelqu’un vous plagiait ? ».
Comment se sentirait cette nouvelle génération d’internautes créateurs ? Très différemment de ceux qui leur posent la question…

En effet, la première confrontation significative qu’un jeune d’aujourd’hui ait avec le droit d’auteur, c’est via des sites tels YouTube. Qu’y apprend-il ? Que s’il veut poster un extrait de son émission préférée, ou un blockbuster qui lui a plu, il n’en a pas le droit –il n’a apparemment pas même le droit de filmer le tournage d’un gros budget.

Par contre, s’il poste une de ses créations, il concède « à YouTube le droit non exclusif, cessible (y compris le droit de sous-licencier), à titre gracieux, et pour le monde entier d’utiliser, de reproduire, de distribuer, de réaliser des œuvres dérivées, de représenter et d’exécuter le Contenu dans le cadre du Service ou en relation avec la mise à disposition de ce Service et l’activité de YouTube, notamment, sans limitation, pour la promotion et la redistribution de tout ou partie du Service (et des œuvres dérivées qui en résultent), en tout format, sur tout support et via tous les canaux média ».

A votre avis, laquelle de ces deux façons de traiter le droit d’auteur énerve notre génération Y ? Si vous avez répondu « la deuxième », vous faites partie de la génération X.

L’emprunt comme création communautaire

Dans la culture dématérialisée des natifs du numérique, l’emprunt n’est pas associé au vol mais à la création communautaire. Pour les membres de la culture du remix, l’emprunt est au cœur de la création, en même temps qu’il représente un hommage (ou à tout le moins une réaction) à une création antérieure. Ce qui frustre un/e Gen Y, ce n’est pas que quelqu’un puisse réutiliser ses productions sans son consentement, c’est qu’il ne puisse mettre les doigts dans celles des autres –particulièrement celles qui forment le canevas de sa propre culture. La culture du remix crée de nouvelles phrases à partir d’un alphabet social partagé par une génération ; ainsi, cet extrait « réinterprété » de La Guerre des Étoiles” ne serait pas si drôle sans le contrepoint de son contexte de départ.

Adopter Turnitin dans les écoles comme remède au plagiat, et faire l’économie d’une réflexion de fond avec les élèves sur le sujet du droit d’auteur, c’est passer à côté de l’essentiel, pour les enseignants comme pour les élèves ; pour les enseignants, car ils ne pourront saisir le clivage radical qui existe entre la génération de la propriété et celle du partage ; et pour les élèves, car ils passeront à côté des enjeux culturels et créatifs liés au droit d’auteur et à la propriété intellectuelle, à l’heure où ces notions sont revisitées partout dans le monde.

Et pour entamer la discussion sur le droit d’auteur et la propriété intellectuelle avec les jeunes et les moins jeunes, je ne saurais que trop conseiller l’excellent documentaire RIP : a Remix Manifesto, du jeune réalisateur canadien Brett Gaylor.

Illustration CC FlickR par foundphotoslj, Digirebelle ®, dbostrom

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http://owni.fr/2010/07/28/le-plagiat-dans-la-culture-du-partage/feed/ 11
Mon stagiaire est un mutant, je l’ai trouvé sur Twitter http://owni.fr/2010/03/31/mon-stagiaire-est-un-mutant-je-lai-trouve-sur-twitter/ http://owni.fr/2010/03/31/mon-stagiaire-est-un-mutant-je-lai-trouve-sur-twitter/#comments Wed, 31 Mar 2010 17:27:10 +0000 JCFeraud http://owni.fr/?p=11269 J’ai fait la connaissance de Christophe il y a quelques mois en m’abonnant à son compte Twitter : @FoireauxLiens. J’avais repéré ses tweets d’actu qui tombaient chaque jour avec la régularité maniaque d’un fil d’agence en faisant ma petite revue de presse matinale sur ce fameux site de micro-blogging où l’on poste des messages en 140 signes en y associant des liens internet.

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Twitter est devenu un outil de veille indispensable à mon métier de journaliste… voire une drogue dure, je vous en ai déjà parlé. Alerté à deux ou trois reprises sur des “hot news” techno (la sortie imminente du GooglePhone par exemple) grâce au fil de Christophe, je me suis dis ce gars-là est un crack, une vraie moissonneuse à liens intéressants, une agence de presse à lui tout seul ! Sûrement l’un de ces jeunes journalistes web aux dents longues qui sont en train de nous pousser, moi et mes copains quadras, vers le cimetière des éléphants de l’ère Gutenberg…

Je ne l’avais jamais rencontré “IRL” (In Real Life), juste quelques clins d’œil échangés sur Twitter. Et voilà qu’un beau jour je reçois un “DM”, un direct message de Christophe me demandant poliment si d’aventure il pourrait faire un stage dans mon service aux “Échos”.

Ah bon OK me dis-je, ce gars doit être étudiant en école de journalisme. Je lui demande son CV, références, stages déjà effectués blablabla… Un blanc au bout du fil… “Heu je suis en 3ème, mais je veux devenir journaliste…”, me répond-il. Christophe a 15 ans, il vit en banlieue parisienne. Je manque de tomber de ma chaise, me ressaisis et lui dis “OK coco tu as le job”… à savoir une semaine de stage conventionné. Certes, c’est la crise de la presse, on n’arrête pas le progrès, mais chez nous on ne fait pas encore dans le mineur de 15 ans menotté à son clavier pour pisser de la copie sur tous les supports… Mais bon, tant qu’à faire, puisque je l’ai sous la main cette semaine, autant l’exploiter un peu sur mon blog !

Christophe n’est-il pas l’un de ces jeunes mutants numériques qui n’ont plus assez d’yeux pour zapper sur la multitude d’écrans de notre merveilleuse société de consommation high-tech ? Intéressant sujet d’expérience : soumettons-le à la question pour savoir comment, lui et les djeun’s en général, consomment les médias.

L’exercice est très à la mode depuis que la banque Morgan Stanley a demandé l’été dernier au jeune Matthew, 15 ans, de se livrer à cet exercice pour tenter d’y voir plus clair sur la manière dont les vieux médias, totalement largué par la révolution Internet, peuvent survivre au Big Bang numérique… J’ai d’ailleurs piqué l’idée à ma consœur Marie-Catherine Beuth qui a déjà soumis son stagiaire au questionnaire de Morgan Stanley sur son blog Etreintes Digitales.

Mais assez bavardé, voilà donc l’Oracle de Christophe, 15 ans, “digital native” de son état :

Internet est le premier média… “Les jeunes de ma « génération », celle de 1992 -1994 , sont nés avec Internet. Mais nous n’utilisons pas tous Internet de la même manière. Pour moi qui suis passionné par l’informatique et le journalisme, Internet est le premier média. Pour d’autres, c’est la télévision. Ou encore les jeux vidéos. J’utilise beaucoup Twitter car je trouve que c’est un « outil » énormément utile. Et pour énormément de choses. Twitter m’a permis d’approcher l’actualité d’une manière inédite. De parler avec des gens qui ont les mêmes centres d’intérêt que moi. Bref, de faire des choses que je n’aurais pas pu faire facilement à mon âge… Comme s’improviser journaliste par exemple. Internet me permet, rapidement et gratuitement, d’accéder aux nouvelles, dans le monde entier. Si quelque chose m’intéresse particulièrement, je peux trouver toutes les infos sans aucun problème. Ce qui n’est pas possible sur les autres médias”.


90 % de mon temps sur Twitter : “Twitter m’a même permis de trouver un stage aux Échos. C’est bien utile. Pour partager, discuter, rencontrer. Ça reste mon premier outil sur Internet. J’y suis quasiment 90% de mon « temps Internet », voir plus. « Temps Internet » qui est de l’ordre de deux à trois heures par jour pour les jeunes en général… et jusqu’à cinq à six pour les plus connectés, comme moi par exemple.”


Facebook m’inquiète
“Facebook est beaucoup plus utilisé que Twitter par les jeunes. « T’as Facebook ? », un peu marre d’entendre ça. « T’as pas Facebook ? », ça aussi. Certains passent 80 % de leur temps Internet sur Facebook et pensent que je n’ai pas envie de partager mon profil avec eux. Mais en voyant moi ce qu’ils partagent sans se soucier une seconde de leur vie privée, je trouve cela vraiment inquiétant. Donc j’évite, et j’ai lâché cette connerie depuis quelques mois”.

MSN pour rester en contact
“En revanche je laisse ma messagerie MSN connectée en permanence pour rester en contact avec quelques amis s’ils ont besoin de me joindre. Quand aux mails, les jeunes ne s’en servent pas, ils préfèrent la messagerie instantanée ou les SMS. Moi je trouve cela bien utile quand même car je peux archiver ce que je reçois et m’en resservir”.

Je regarde peu la télévision…
“Franchement, la télé ça ne m’intéresse pas beaucoup. Je préfère aller sur Internet. Si j’ai envie de voir une vidéo, je vais sur YouTube. Si un sujet d’actualité m’intéresse, il y a bien plus de chose sur YouTube qu’à la télévision : des images venues du monde entier et aussi des images tournées par des gens ordinaires qui ne sont pas forcément des journalistes. Je ne m’intéresse presque pas aux films, je préfère les documentaires qui parlent de la vie réelle et savoir ce qui se passe dans le monde. Du coup, je n’utilise pas les sites pour télécharger des films ou des séries. Mais d’autres le font beaucoup, c’est bien connu. ;-)”


Les jeunes n’achètent pas de journaux :”Ici aux Échos, j’entends parler d’inquiétudes pour l’avenir des journaux papier avec Internet. Je n’étais pas vraiment au courant de tout cela. Mais c’est vrai les jeunes n’achètent pas de journaux car cela coûte cher et c’est moins pratique. Pour s’informer, ils vont sur Internet parce que c’est gratuit, facile, mais ils sont un peu agacés quand il y a trop de publicités comme par exemple sur 20minutes.fr. Moi j’achète de temps en temps des journaux comme Le Monde ou Le Figaro. Dans la presse papier, la qualité des articles est nettement meilleure que sur le web en général. Et il y a plus d’informations, d’analyses, de contexte. Beaucoup moins de copies de dépêches d’agences de presse. Le problème c’est que pour s’abonner, il faut passer par un adulte… C’est assez bloquant. Pour que les jeunes s’intéressent aux journaux, il ne faut pas forcément inventer des journaux interactifs sur Internet mais plutôt leur faire des offres spéciales ou leur faire découvrir la presse de l’intérieur. Ce qui serait sympa ça serait de voir un peu plus comment ça marche dans les rédactions, ce genres de trucs, mais malheureusement ce secteur-là est très fermé, surtout quand on habite en banlieue…”.

Décryptage :

OK Christophe n’est pas représentatif de jeunes de son âge. Bien qu’il s’en défende, c’est un vrai “geek” qui préfère son écran d’ordinateur à la télévision au point d’y passer plusieurs heures par jour quand d’autres vont taper dans le ballon.

C’est un sur-consommateur d’Internet, l’un des rares ados que l’on croise sur Twitter (un média essentiellement utilisé par les journalistes, les technophiles et les blogueurs, sinon on en parlerait moins). C’est aussi un accro à l’info, un passionné d’actualité comme j’en ai rarement vu à son âge. Un futur journaliste peut-être, je lui souhaite s’il en a toujours envie dans dix ans (à condition que la profession n’ait pas été robotisée d’ici là ;-).

Mais aussi un lecteur de demain, puisqu’il l’est déjà. C’est justement ce qui est intéressant quand on réfléchit à l’avenir des journaux papier et des médias en général. Ce jeune mutant numérique n’a pas compris de quoi je voulais parler quand j’ai tenté de lui expliquer qu’au début de ma carrière on copiais/collais nos papiers avec des ciseaux et de la colle. Il m’a demandé “est-ce qu’on est obligé d’imprimer à chaque fois les articles ? Ça fait gaspiller du papier”. Mais il m’a aussi avoué qu’il avait commencé à s’intéresser aux journaux papier, jusqu’à les acheter, via leur site Internet. Une exception ? Sûrement.

Mais vous savez ce qu’il m’a dit ? “Vous et moi on n’est pas de la même génération, mais on n’est pas si «éloignés » finalement. Chacun de son côté essaye d’y voir un peu de l’autre côté. Moi, je suis séduis par la presse papier, voir fasciné. Vous, vous êtes devenus très fan de Twitter et des blogs…”.

Sortir du conflit de génération stérile entre vieux et nouveaux médias, amener les jeunes à s’intéresser à la presse via Internet, et faire en sorte que la presse s’intéresse un peu plus aux jeunes et à leurs nouveaux modes de consommation multi-écrans…

Pour les journaux, c’est sûrement l’une des clés pour survivre au grand Big Bang numérique. Bien avant l’éternel débat sur comment faire payer mes contenus sur Internet. Il faut toujours parler avec les djeun’s…

> Article initialement publié sur “Sur mon écran radar”

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http://owni.fr/2010/03/31/mon-stagiaire-est-un-mutant-je-lai-trouve-sur-twitter/feed/ 10
Empêcher les jeunes de maîtriser le numérique ? http://owni.fr/2010/03/15/empecher-les-jeunes-de-maitriser-le-numerique/ http://owni.fr/2010/03/15/empecher-les-jeunes-de-maitriser-le-numerique/#comments Mon, 15 Mar 2010 17:13:03 +0000 Bruno Devauchelle http://owni.fr/?p=10069 ordi

Ce n’est pas tant la technique informatique qu’il faut que les jeunes apprennent que la maîtrise des usages et la culture qui y est liée, explique Bruno Devauchelle, formateur chercheur au CEPEC de Lyon, et nouveau venu sur la soucoupe.

Débat récurrent et stérile : les jeunes maîtrisent-ils ou pas le numérique ? Tant qu’on n’a pas défini ce que l’on met derrière ce questionnement, le débat est éternel et stérile. Et c’est ce qui se passe avec ce travail de septembre 2009 publié à Namur ou encore l’enquête CEFRIO… C’est cet article qui me fait réagir aujourd’hui : « Les jeunes ne sont plus intéressés par l’outil-ordi ».

Encore une fois, on tente de démontrer que les jeunes ne maîtrisent pas la technique informatique et qu’ils ne se consacrent qu’au jeu et à la communication. Mais on peut envisager une analyse de cette approche un peu différente. Pour amorcer cette réflexion, on peut reprendre cette interview de Jean-Noël Lafargue et en particulier ce passage en réponse à la question : «Qu’est-ce qui est caractéristique de leur approche et leur usage du numérique ? » :
« La facilité. Aux débuts de l’informatique, il y a trente ans, l’ordinateur servait presque uniquement à programmer, à fabriquer des choses. On inventait, découvrait, défrichait. Pour ma génération, l’ordinateur a été une conquête. On l’a vu arriver chez nous. Pour les étudiants d’aujourd’hui, ça existe depuis toujours. Ils baignent dedans,
c’est leur univers et ils ne le remettent pas en question. La plupart ne sont pas intéressés par le fait d’utiliser l’ordinateur comme outil. Plus ça va, plus il devient un média. Moins on fabrique et plus on consomme. Et les jeunes sont essentiellement bons pour consommer et communiquer. »

Un discours de nostalgiques

Il est toujours amusant de faire un parallèle avec d’autres technologies développées antérieurement et de constater que ce même discours pourrait s’y appliquer. En fait on a un peu l’impression d’un discours de nostalgiques…, peut-être même un discours de vieillissement, regrettant le bon vieux temps. Mais l’analyse semble juste, si tant est qu’on ne regrette pas cette époque du bidouillage et que l’on observe les choses sous un autre angle, celui de la banalisation, de la stabilisation sociale d’un objet technique. Car il semble bien que ce soit ce qui est en train de se produire. Les regrets d’une situation antérieure pendant laquelle on allait voir dans le ventre de la machine ne peuvent avoir d’intérêt que si c’est pour mieux mesurer les écarts et les changements, mais pas pour préconiser un changement par retour aux habitudes antérieures, car là, rien n’est plus possible.

Que s’est-il donc passé ? A force de crier qu’il fallait apprendre l’informatique à des générations de jeunes, les industriels et les commerçants, maîtres en développement des marchés ont vite compris que les passionnés et les bidouilleurs ne seraient pas une clientèle porteuse si elle n’est pas accompagnée par un ensemble de « suiveurs ». Mais ces suiveurs, parce qu’ils ne sont pas aussi passionnés, professionnels parfois et qu’ils ont aussi d’autres préoccupations ont vite repoussé cette culture du passionné au profit de la culture de l’outil au service de, voir au profit du détournement instrumental de l’outil au service de leurs besoins. Les promoteurs du marché ont vite compris qu’il valait mieux cacher le vilain moteur informatique au profit de magnifiques interfaces intuitives et Apple leur a fourni un espace d’expérimentation essentiel. L’accessibilité s’est parée des vertus issues de l’ergonomie. Du coup les anciens, les spécialistes, les bidouilleurs et autres spécialistes de l’informatique se sont retrouvés renvoyés dans les bureaux dont ils avaient réussi à sortir avec la démocratisation de l’informatique. Pensant peut-être être devenus les maîtres de ce monde là, ils ont déchanté et toutes ces critiques envers les jeunes sont surtout des messages vers les autres adultes en les invitant à les suivre et à marginaliser les jeunes et la culture naissante basée sur les usages de proximité et non pas les pratiques d’excellence. Ainsi on peut penser que la défiance vis-à-vis des pratiques jeunes, en particulier celles issues du monde scolaire et universitaire sont de ce registre, celui d’une perte de maîtrise d’un objet qu’ils avaient pourtant réussi à dominer (rappelons les anciennes séries informatiques H au lycée dans les années 80) et regardons l’arrivée des nouvelles séries STI en particulier en ce moment au lycée).

En fait on est passé d’un numérique factuel à un numérique conceptuel et surtout culturel. Et comme le numérique est désormais aussi facile à utiliser qu’un livre, on retrouve la même problématique. Ce n’est pas parce qu’on enseigne la lecture et l’écriture que les élèves deviennent des grammairiens, des romanciers, etc… Certaines mauvaises langues disent même que certains enseignements ont un effet repoussoir sur les jeunes (cf. les filières scientifiques du lycée qui n’alimentent pas celles du supérieur…). La question qui se pose actuellement au monde scolaire et universitaire est que le numérique a pris une place telle dans la culture et les usages qu’il devient plus urgent de travailler cette culture que la technique qui l’a rendue possible. En d’autres termes, l’enseignement de la machine (pour faire court) est secondaire
par rapport à la maîtrise des usages et la culture qui y est liée. Or comme les usages se sont de plus en plus déconnectés de la machine elle-même au profit d’abstractions (le stockage des données est en train de basculer avec le développement du nuage -le Cloud-), on voit apparaître un débat de fond sur ce qu’il convient de faire dans le monde de l’enseignement.

De plus les adultes que nous sommes ont laissé à nos enfants un terrain de jeu formidable et nous leur reprocherions de s’en emparer. Que n’étions-nous pas content de ces interfaces souris graphique au début des années 80 avec les premiers Macintosh ! Que n’étions-nous pas heureux d’en finir avec les lignes de commande de MS-DOS ! Que ne
sommes-nous pas béats de voir nos tous petits accéder à ce monde numérique avant même que de savoir lire et y posons même l’hypothèse d’une nouvelle attention et motivation pour l’apprentissage.

Que les jeunes maîtrisent ou pas les arcanes des machines qu’ils utilisent est désormais une question dépassée. Cette question ne concerne plus que ceux qui veulent faire profession (ainsi en est-il aussi du garagiste et de l’automobile) et c’est normal qu’eux la travaillent. Ce qui est essentiel de maîtriser désormais ce n’est plus la machine, mais la part d’humain qui est contenu dans les dispositifs numériques qui nous entourent. En effet cette part d’humain à souvent les couleurs d’une humanité douteuse (la surveillance systématique par exemple, la perte de l’intime, l’absence de possibilité d’effacer ses données etc…).
Or cette part d’humain qui au départ était relativement facile à percevoir dans la machine devient de plus en plus difficile à repérer. Et pourtant chaque machine n’est pas qu’un outil qu’on peut adapter à soi, c’est aussi une intention contenue dans la façon même dont elle se laisse utiliser. Or ce qui est le plus grave ce n’est pas que l’on ne connaisse pas la technique sous-jacente, mais que des concepteurs ont mis leur intention dans la technique dispositive elle-même de manière à rendre l’usager dépendant. En éducation comme ailleurs ces intentions pensent être lues à livre ouvert alors que le quotidien des usages et des propos sur les usages par les adultes qui travaillent dans l’enseignement nous montrent qu’on est très loin de cette conscience. La naïveté des propos de certains responsables (M. Fourgous y compris) laisse rêveur sur l’ampleur de la bataille de la conscience à gagner.

Le plan numérique pour l’éducation promis saura-t-il faire une part à cette question ? On ne peut qu’en douter tant que l’on n’aura pas défini précisément les finalités des formations et des modes d’usages et d’appropriation qui seront proposés aux enseignants…
À suivre et à débattre.

Billet initialement publié sur le blog de Bruno Devauchelle

Image newrambler sur Flickr

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L’éducation numérique, c’est pour bientôt ? http://owni.fr/2010/03/01/l%e2%80%99education-numerique-c%e2%80%99est-pour-bientot/ http://owni.fr/2010/03/01/l%e2%80%99education-numerique-c%e2%80%99est-pour-bientot/#comments Mon, 01 Mar 2010 08:53:44 +0000 Stanislas Jourdan http://owni.fr/?p=9215

Le 15 février dernier, le gouvernement a annoncé la préparation d’un plan visant à moderniser l’Éducation nationale. Les principales mesures de ce plan seront inspirées du Rapport Fourgous (pdf) sur le développement du numérique à l’école.

Sans rentrer dans les détails, je vous propose une lecture transversale de ce rapport.

Investir dans la matière grise, pas que dans le matériel

Le premier constat sur lequel ce rapport se base est que les investissements dans l’équipement matériel ne suffit pas. Et l’on peut difficilement ne pas être d’accord : donner les outils, c’est bien, encore faut-il former nos jeunes à les utiliser. D’ailleurs, les outils informatiques sont de toute façon déjà partout : à l’école comme à la maison, et pour certains même dans leur poche… Là n’est donc plus vraiment l’enjeu. il faut donc former à l’usage de ces outils…

Le mirage de la génération Y

On a beau dire que la jeune génération, les « digital natives » qui sont « nés le clavier dans les mains », est plus à l’aise avec ces outils, encore faut-il enseigner les bonnes pratiques…  À ce titre, la lecture de cet article écrit par un professeur d’informatique est très édifiante :

Il semble qu’une nouvelle vague d’étudiants arrive en écoles d’art, des étudiants « post-micro-informatique », relativement malhabiles face aux logiciels bureautiques ou de création, auxquels ils ont pourtant eu accès au collège. Cette observation récente et empirique semble confortée par les travaux de chercheurs de la Fondation Travail et Technologie de Namur, auteurs d’une étude évoquée par une interview pour le journal Le Monde, étude qui tend à établir qu’une partie des adolescents et des jeunes adultes manquent d’aisance avec les outils informatiques dont ils disposent pourtant et dont ils sont quotidiennement consommateurs.

Ouch ! ;-)

Ne soyons donc pas naïfs quant à la nature de ces générations Y (ou je ne sais quoi « natives ») : il y a un réel besoin de formation aux usages, mais pas seulement. Il y a en effet un décalage flagrant dans le fait que les jeunes sont certes accoutumés à manier une souris et un clavier, mais qu’ils n’ont pas forcément conscience du changement profond que ces outils apportent (justement parce qu’ils ont toujours connu ces outils). Ils n’ont pas connu la transition comme les générations précédentes.

Éduquer les éducateurs…

C’est là que le rôle des éducateurs est crucial : eux ont le recul nécessaire : ils ont connu l’ancien monde… mais ils doivent encore pour la plupart acquérir la perspective numérique.

Et c’est là que le rapport Fourgous a vu juste : miser sur l’éducation des professeurs au même titre que celle des élèves. Cela semble de bon sens, pourtant la tentation a été grande jusqu’à présent de vouloir les court-circuiter pour s’occuper directement les soit-disant premiers intéressés à savoir les jeunes.

Cela sera-t-il suffisant ?

Il semble indéniable que ce rapport va dans le bon sens. Pour autant, comme je tiens souvent à le souligner, le numérique est un enjeu qui dépasse bien souvent les considérations traditionnelles. Il nous amène à repenser en profondeur chaque couche du système actuel. Il en est de même pour le vaste sujet de l’éducation 2.0. Peut-être faudra-t-il aller plus loin que le simple enseignement de l’utilisation des outils numériques. Peut-être faudrait il apprendre à penser le numérique ?

À ce titre, je vous invite vivement à lire l’article de Henri Verdier sur ce sujet, qui, je ne peux le cacher, m’a inspiré cette réflexion et dont je vous propose un extrait :

Je crois qu’on a tort de réduire la question du numérique à un problème d’équipement, de ressources, de formation et de volontarisme. Notre système éducatif a été bâti au nom d’objectifs bien précis, autour d’une stratégie d’industrialisation des processus éducatifs bien précise. Et il tient assez bien depuis Jules Ferry. Dans ce cadre, le numérique peine à trouver une place, parce que les nouvelles technologies n’apportent jamais de gain d’efficacité dans une organisation si elles ne sont pas accompagnées d’une réorganisation.

L’usine, le bureau, l’armée ou le bloc opératoire de 2010 n’ont rien à voir avec leurs ancêtres de 1910. Les grands principes d’organisation de l’école sont les mêmes. Aucun changement radical ne se produira dans les écoles sans un changement de même ampleur.
Et comme on ne décrètera pas ces changements d’un trait de plume, et comme on va devoir expérimenter et innover, il va falloir commencer par la mère de toutes les réformes : faire confiance aux enseignants, leur donner une liberté d’organisation, leur donner latitude de faire bouger les organisations, voire en partie les programmes. Et comme on veut garantir l’égalité républicaine, il va falloir inventer des processus d’accompagnement de ces expérimentations et repenser l’encadrement et les inspections. Et comme tout ceci coûte cher il va falloir assouplir les possibilités d’investissement des établissements scolaires et des enseignants eux-mêmes. Et à tous les étages il va falloir mettre des degrés de liberté. [Lire la suite]

En d’autres termes, l’écueil serait de vouloir apprendre aux jeunes à utiliser des outils nouveaux… avec des vieilles méthodes et un contexte obsolète…

L’esprit “2.0″ ne peux pas s’enseigner comme on apprend le théorème de Pythagore. En revanche, il peut se transmettre subtilement en s’intégrant dans l’esprit du système d’éducation de demain. Ce n’est pas encore l’heure de la récré M. Chatel !

Parole d’un vieux de 21 ans (sic) ! ;-)

Article initialement publié sur Tête de Quenelle !

Photo CC Flickr Dean Terry

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Les ados américains dopés à l’Internet non-stop http://owni.fr/2010/02/25/les-ados-americains-dopes-a-linternet-non-stop/ http://owni.fr/2010/02/25/les-ados-americains-dopes-a-linternet-non-stop/#comments Thu, 25 Feb 2010 18:37:52 +0000 Capucine Cousin http://owni.fr/?p=9043 3356695149_18e3e7a003

Source image : Flickr/Louise Merzeau (sélection officielle du Mois de la Photo, Paris, 2008)

Les ados d’aujourd’hui seraient-ils des (futurs) drogués aux écrans ? Je ne parle pas des écrans télés, qui était la drogue des ados de ma génération – et qui serait en passe de devenir has-been aujourd’hui. Non, je parle des écrans d’ordinateurs, laptops, netbooks et autres smartphones.

Encore la semaine dernière, cette étude de Pew Internet and American Life Project a beaucoup fait jaser (et gazouiller ;) sur le sujet. D’après celle-ci, les ados américains délaisseraient les blogs au profit des réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter : seulement 14% déclarent avoir blogué en 2009, alors qu’ils étaient 28% en 2006.

“Si vos enfants sont réveillés, ils sont probablement en ligne”, titrait le 20 février, avec un humour grinçant, le New York Times. Et de citer une étude de la Fondation Kaiser, d’après laquelle les ados sont de véritables nerds en puissance. D’après cette étude, réalisée auprès de 2 000 collégiens et lycéens (entre octobre 2008 et mai 2009), les 8-18 ans consacrent en moyenne 7 heures et demie à leur écran d’ordinateur, netbook ou smartphone – au-dehors des heures d’école. Soit une heure de plus qu’il y a 5 ans, année de l’étude précédente. Il faut dire qu’ils sont assez (sur)équipés : parmi les ados sondés, 7 sur 10 avaient une télé dans leur chambre, et à peu près un tiers un ordinateur doté d’une connexion Internet dans leur chambre. Et encore, cette étude a été réalisée un peu avant que les smartphones ne se développent chez les ados.

En clair, ils passent plus de temps sur leurs écrans que leurs parents sur leur lieu de travail ! Qui plus est – mais cela a déjà été dit, dont par mon confrère Jean-Christophe Féraud – cette génération de digital natives a pris l’habitude à ‘être multitâches en quelque sorte : envoyer des SMS tout en étant sur Facebook, et/ou le chat Facebook, MSN, son blog, consulter ses mails sur Gmail, tout en regardant un clip sur son iPod… Et encore : l’étude de Kaiser a été menée avait l’incursion de Twitter…

La fonction qu’utilisent le moins les jeunes sur leur téléphone portable ? La voix ! Tellement plus simple d’envoyer des SMS ou de chater, comme le montrait le film “LOL” – so bobo ;), mais assez réaliste sur l’usage des technos par les ados. Et le seul moyen de communication dont l’usage n’a pas augmenté est… le papier imprimé.

En fait, ils se serviraient davantage de leur portable multifonctions comme réveil, comme radio, comme sorte de méga-clé USB pour stocker notamment des fichiers MP3 (et donc pour écouter de la musique)… Il faut dire que les nouvelles générations de smartphones sont d’une facilité d’utilisation assez diabolique, grâce à des interfaces de plus en plus intuitives. Les dernières générations des Blackberry sont des modèles plus simples à utiliser qu’avant – du coup, ils commencent à envahir les cours de récré des collèges et lycées huppés – car souvent, papa et maman refilent leurs Bberry à leurs rejetons lorsque leur entreprise en reçoit un nouveau parc, comme l’expliquait ce papier des Echos.

Mais les autres modèles de smartphones de chez LG et autres Samsung, relativement bon marché et à l’interface – de plus en plus souvent tactile – bien agréable, ont aussi les faveurs des ados. Je mettrais le cas de la tornade iPhone un peu à part, encore trop cher pour nombre de djeuns. Mais clairement, mettez un iPhone entre les mains d’une petite tête blonde : c’est édifiant. Ma nièce de 4 ans 1/2 sait déjà ouvrir les applis comme une grande, et joue sur l’iPhone de son papa avec les jeux (pour enfants) qu’il y a installés. Ma soeur me racontait que sa fille avait déjà le réflexe de toucher l’écran d’ordinateur, le croyant lui aussi tactile.

Contrôle de la durée d’utilisation (à défaut du contenu ?) par les parents

Le contrôle du contenu par les parents ? Certes, il y a eu plusieurs initiatives des pouvoirs publics. J’aime bien celle-ci, qui vient d’être annoncée, avec 2025 ex machina , un serious game destiné à sensibiliser les adolescents. Dans son premier épisode, “”Fred et le Chat démoniaque”, qui se déroule en 2025, on voit un certain Fred, un jeune trentenaire sur le point de décrocher un contrat publicitaire important, qui voit son contrat compromis par l’apparition d’une vieille photo de lycée compromettante sur le réseau social Amidami.net. A l’internaute de l’aider à effacer cette erreur de jeunesse. Dévoilé la semaine dernière, ce serious game pédago a été produit par l’éditeur Tralalere, avec le soutien de la Commission européenne et la participation du CNC, dans le cadre du programme Internet sans crainte. Les épisodes suivants, qui paraîtront progressivement d’ici à l’automne 2010, auront chacun pour thème un usage particulier du Net.

A côté de cela, clairement, c’est aux parents d’apprendre à leurs enfants à “bien” surfer sur Internet. Un ami me racontait récemment qu’il a accepté que sa fille pré-ado s’inscrive sur Facebook… A condition qu’il figure parmi ses “friends” et puisse contrôler ce qu’elle y fait.

Mais encore dernièrement, une étude du Pew Internet Project en avait alarmé bon nombre. D’après celle-ci, un ado sur sept muni d’un téléphoné portable déclarait avoir déjà reçu des photos plus que suggestives par SMS. Les mêmes chercheurs admettent que le “sexting” – que l’on voit aussi subrepticement dans le film “LOL” – fait désormais partie de leur culture. Car chez les ados, la photo dénudée peut être envoyée comme invitation, comme gage, ou… lors d’une rupture.

2025_m

Dans les faits, les parents peuvent difficilement contrôler ce que font leurs enfants sur leur ordi, qui plus est s’ils en ont un dans leur chambre. Les plus courageux, certes, installent un système de contrôle parental… Mais les spécialistes commencent à penser que le véritable contrôle que les parents peuvent exercer est celui de la durée d’utilisation. “Les parents peuvent continuer de fixer les règles du jeu, c’est cela qui fait la différence”, explique un des chercheurs dans le papier du NY Times. Certes, c’est plus difficile de le faire sur l’ordinateur “perso” de leur enfant que sur l’ordinateur familial, mais ils continuent ainsi à jouer leur rôle de parents.

» Article initialement publié sur blog.miscellanees.net

» Photographie de page d’accueil par escapedtowisconsin sur Flickr

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#Chatroulette : Andrey Ternovskiy, le créateur de 17 ans, s’exprime enfin http://owni.fr/2010/02/14/chatroulette-andrey-ternovskiy-le-createur-de-17-ans-temoigne/ http://owni.fr/2010/02/14/chatroulette-andrey-ternovskiy-le-createur-de-17-ans-temoigne/#comments Sat, 13 Feb 2010 22:05:13 +0000 Admin http://owni.fr/?p=8118 Pour la Saint-Valentin, la soucoupe vous offre deux merveilleux articles sur Chatroulette. Un site où, nous en sommes certains, de nombreuses idylles verront le jour.

Amour sur vous tous.

C’était le buzz de ces dernières semaines sur le web : Chatroulette, un chat vidéo aléatoire avec un internaute du monde entier. Comme à la loterie, on ignore sur qui – ou quoi – on va tomber : un être humain, une bite, sa voisine… Une socialisation trash interdite au moins de seize ans.

On ignorait jusqu’à présent l’identité de l’auteur du site. Le blog Bits, du New York Times a réussi à lever le mystère de la plus simple des façons, en envoyant un questionnaire par mail sur le site. M. Chatroulette s’appelle M. Ternovskiy, et c’est un étudiant moscovite de 17 ans. Loin des adolescents obsédés par les filles qui comptent parmi les fans de Chatroulette, le jeune homme est surtout un bel exemple de la génération Y.

Voici la traduction de ses propos :


” J’étais pas sûr de savoir si je devais dire au monde qui j’étais car je suis mineur. Maintenant, je pense que ce serait mieux de me dévoiler.

J’ai créé ce projet pour m’amuser. Au début, je n’avais pas d’objectif commercial. Je l’ai créé récemment. J’étais et je suis toujours moi-même un adolescent, c’est pour ça que je sentais ce que les autres adolescents voulaient voir sur Internet. J’aimais moi-même parler à des amis avec Skype en utilisant un micro et une webcam. Mais finalement on s’est lassé de se parler les uns les autres. J’ai donc décidé de créer un petit site pour moi et mes amis où nous pourrions nous connecter aléatoirement avec d’autres gens.

Cela n’a pas été si facile pour moi de le créer, mais je code depuis l’âge de 11 ans (grâce à mon père qui m’a amené tôt sur le web – la plupart des mes connaissances viennent de là).

Je n’ai pas fait de publicité pour mon site et je n’ai rien posté à son sujet, mais d’une façon ou d’une autre, les gens ont commencé à en parler entre eux. Et l’information s’est mise à circuler. C’est ainsi que le nombre d’utilisateurs simultanés est passé de 10 à 50 puis de 50 à 100 et ainsi de suite. À chaque fois que le nombre d’utilisateurs a augmenté, j’ai dû complètement réécrire le code, parce que mon logiciel et l’équipement ne suivaient pas. Je n’aurais jamais pensé que faire face à une charge pareille serait la part la plus difficile de mon projet.

Comme la base d’utilisateurs grandissait, les factures de bande passante et d’hébergement ont commencé à augmenter. Je suis content que mes proches m’aient aidé sur ce point en ‘investissant’ un peu d’argent dans mon idée.

Cela n’était pas une somme importante, je n’ai donc pas pu m’acheter de nouveaux serveurs, à la place j’ai dû optimiser mon code autant que possible. Je dois dire que beaucoup de gens m’ont aidé et m’aident encore quand j’ai des questions sur le code. Je leur en suis très reconnaissant. Je continue cependant à tout coder moi-même. J’aimerais partager mon travail avec quelqu’un d’autres mais je ne suis pas aux USA, et la plupart des gens intéressés sont loin de moi, car je vis à Moscou. Donc je dois encore tout faire moi-même. Mais je ne m’inquiète pas.

J’aime ce que je fais. C’est comme un jeu pour moi. Je fais des découvertes Je résous des problèmes intéressants.

Chatroulette utilise sept serveurs haut de gammes tous situés à Francfort, en Allemagne. Le débit réseau est de sept gigabits par seconde, j’utilise différentes technologies pour minimiser la consommation de bande passante. Mais beaucoup de bande passante est toujours consommée. Les montants des factures de bande passante me choquent en tant qu’adolescent mais je ne me fais pas de soucis. Je suis content que les gens manifestent de l’attention envers le projet, j’ai reçu des offres intéressantes qui pourraient certainement aider mon projet à survivre et à s’améliorer.

La publicité sur Chatroulette est gardée au minimum, car il existe de nombreux sites plein de publicité qui vous distraient de ce que vous voulez faire sur ces sites. J’aime aussi le minimalisme. C’est pourquoi je n’ai mis que quatre liens publicitaires en bas de page. Et ce qui est intéressant, c’est que ces publicités couvrent quasiment toutes les dépenses, seulement ces quatre liens en bas!

Je pense que c’est merveilleux de ne pas avoir à mettre beaucoup de publicité sur mon site pour qu’il continue de fonctionner. Je ne suis pas sûr de savoir pourquoi. Peut-être parce que Google AdSense (l’outil que j’utilise pour afficher les publicités) affiche des liens vers divers chat vidéos. Je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. En fait je pense même que c’est une bonne chose, car seuls les gens qui ne sont pas intéressés ou qui sont fatigués d’utiliser mon site cliquent sur ces liens, pour explorer d’autres services.

Je suis conscient que Chatroulette est populaire aux USA. C’est intéressant mais je n’ai moi-même jamais été aux USA. Pourtant la plupart des utilisateurs de mon site viennent de là. J’aimerais visiter les USA.

En fait je pense que le mieux serait que Chatroulette soit une entreprise basée aux USA. Mais c’est juste une idée.

J’ai toujours voulu que Chatroulette soit quelque chose d’international. C’est pour cela que j’ai choisi l’Allemagne pour l’hébergement, parce que c’est à mi-chemin entre la Russie et les USA. C’est aussi le centre névralgique de plusieurs réseaux européens. Je pense que c’est le bon endroit pour héberger un projet qui connecte les gens les uns avec les autres partout dans le monde.

Cependant, je prévois d’avoir bientôt d’autres serveurs dans d’autres pays. Avec ça, je vais faire des fonctionnalités plus intéressantes et plus “étranges” (au bon sens du terme) qui vont rendre mon site encore plus amusant.

Ce qui m’empêche actuellement d’ajouter d’autres fonctionnalités qui ont été suggérées par beaucoup et que j’ai eu en tête, c’est que je ne suis même pas sûr de ce qu’est Chatroulette.

Tout le monde trouve sa propre manière d’utiliser le site. Certains pensent que c’est un jeu, d’autres que c’est un monde totalement inconnu, d’autre que c’est un service de rencontre.

Je pense que c’est cool qu’un concept aussi simple puisse être utile à autant de monde. Bien que certains l’utilisent de façon pas très sympa – je suis vraiment contre ça. D’autres font des choses vraiment incroyables auxquelles je n’aurais jamais pu penser. Ils écrivent des chansons sur des étrangers et leurs chantent, les dessinent, écoutent de la musique, leur diffusent leur propre musique. Deux groupes d’adolescents peuvent faire la fête ensemble. À mon avis c’est juste super. Je suis content d’avoir fait ce projet et c’est un plaisir pour moi de travailler dessus.”

Photo : Sankt Andreas sur Flickr

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http://owni.fr/2010/02/14/chatroulette-andrey-ternovskiy-le-createur-de-17-ans-temoigne/feed/ 47
Vie privée sur Internet : état des lieux sur un débat en évolution http://owni.fr/2010/02/01/vie-privee-sur-internet-etat-des-lieux-sur-un-debat-en-evolution/ http://owni.fr/2010/02/01/vie-privee-sur-internet-etat-des-lieux-sur-un-debat-en-evolution/#comments Mon, 01 Feb 2010 07:33:04 +0000 Pierre Mounier http://owni.fr/?p=7360 Beaucoup de publications au cours des dernières semaines ont traité de la question de la protection de la vie privée sur Internet. Jean-Marc Manach écrivait cette semaine dans un billet de son blog, que deux articles récemment publiés sur le site du Monde avait été parmi les plus téléchargés et signalés par les lecteurs à leurs correspondants de tout le site [1]. Autant de signes qui indiquent une réelle inquiétude sur cette question.

Il faut dire que les dirigeants des deux plus importantes sociétés de traitement de l’information sur Internet, Mark Zuckerberg pour le réseau social Facebook, et Eric Schmidt pour le moteur de recherche Google ont récemment jeté de l’huile sur le feu avec des déclarations qui ont provoqué un certain émoi.

Eric Schmidt tout d’abord, est le directeur d’une entreprise, Google, qui collecte en permanence une quantité considérable d’information sur chacune de nos actions sur Internet. Elle accumule aussi beaucoup d’informations sur le monde physique avec ses deux services complémentaires Google maps et Google Street view. Récemment Eric Schmidt, interrogé sur les dangers que font peser actuellement des entreprises comme la sienne sur la vie privé répondit avec légèreté que cette question ne concernait que les criminels, puisqu’ils sont les seuls à avoir quelque chose à cacher [2]. Mark Zuckerberg, fondateur et dirigeant de Facebook fut interrogé de son côté alors que sa société venait de décider de rendre publiques par défaut les informations diffusées par ses utilisateurs sur la plateforme. Il déclara que ce changement de politique accompagnait simplement une évolution des mœurs sur cette question [3].

Dirigeant une plateforme de réseau social en majorité peuplée de gens de moins de trente ans, Zuckerberg renvoie implicitement par cette déclaration à l’idée selon laquelle les générations les plus jeunes n’ont pas la même conception de la vie privée que leurs aînés. Une série d’études publiées récemment ont permis à ces derniers de découvrir – avec effarement parfois -, que la plupart des jeunes, nés avec Internet ne voyaient pas de problème particulier à dévoiler sur le réseau les détails les plus personnels et parfois les plus intimes de leur vie privée. C’est évidemment autour de la sexualité que le conflit de génération est le plus évident. La pratique du « sexting » fait ainsi débat [4].

Jean-Marc Manach fait ainsi apparaître que pour cette génération, les questions de protection de la vie privée ne sont pas loin de pouvoir être défini comme « un problème de vieux con » [5]. A l’inverse, certains renvoient les pratiques des jeunes au pires travers de la société du spectacle et aux pires dérives de la télé-réalité. En gros, résume Manach, aux yeux des plus anciens, ces jeunes secomportent comme des « petits cons » [6].

Tout ceci fait penser à un célèbre chanson de Georges Brassens. Au delà pourtant, ces nouvelles publications nous permettent de découvrir que le souci de la vie privée n’est pas unanimement partagé comme on pouvait le croire. Les normes en la matière ne sont pas fixées ; elles sont fluctuantes entre les époques, les cultures, ce qu’on savait déjà, mais à l’intérieur même d’une société, entre les générations aussi. Cette question ne peut dès lors plus être traitée en bloc, sur le mode du tout ou rien, mais doit faire l’objet d’analyses articulée et détaillées. Cette évolution rend du coup d’autant plus indispensable le travail de sociologues spécialisé sur les nouvelles technologies comme Danah Boyd [7] ou Shirley Turkle [8].

D’ailleurs, cette question de la vie privée est bien loin de se résumer à la simple exposition de détails intimes sur Internet. C’est tout le mérite d’une série de billets publiés par Andy Oram sur le blog de l’éditeur O’Reilly, que d’en déployer tous les aspects [9]. Tout d’abord, elle est liée à la question de le construction de l’identité et de la présentation de soi dans les espaces cybernétiques. Elle se retrouve pourtant aussi au cœur des systèmes de surveillance que les Etats mettent en place sur leurs populations, en particulier depuis le 11 septembre 2001. Oram ne manque pas de faire remarquer à ce propos que les États européens en particulier qui imposent aux sociétés privées des règles très restrictives pour limiter la collecte de données personnelles sont en pleine contradiction lorsqu’ils collectent eux-mêmes de nombreuses données à des fins de sécurité ou contraignent les intermédiaires techniques à conserver des données pendant des durées relativement longues.

Autre aspect concerné, la collecte de données par des sociétés à des fins commerciales. Oram rappelle que cette collecte correspond en fait à deux objectifs très différents : la constitution de profils individuels d’un côté, permettant de délivrer des publicités personnalisées en particulier, l’agrégation de données permettant de construire des populations différenciées selon des comportement distincts de l’autre [10]. Sur ce dernier aspect, on déborde donc de la pure dimension individuelle et on aborde l’espace public : en collectant et agrégeant des masses importantes d’information, les entreprises commerciales construisent une représentation du corps social qui a un effet non négligeable sur celui-ci (offres différenciés, segmentation de marché). Abordée très souvent sous l’angle exclusif de la protection individuelle de la vie privée, cette question des données personnelles bascule donc en fait du côté du politique.

L’affaiblissement ou la remise en cause de la notion de vie privée est sans doute très critiquable, mais elle a le mérite de faire apparaître quelques insuffisances critiques de notre mode d’organisation sociale. Ainsi, Jean-Marc Manach fait-il remarquer à juste titre que si les adolescents n’ont pas le sens de la vie privée, c’est sans doute aussi parce qu’ils ont intégré le mode de fonctionnement d’une société placée sous surveillance constante : caméras de surveillance plantées à tous les coins de rue, logs de connexion retenus pendant un an, traçage des achats effectués au moyen des cartes magasins, suivi des parcours au moyen des carte d’abonnement « sans contact » des transports en commun.

Dans un tel contexte, la notion de vie privée prend une tournure purement défensive. Constamment rognée sur ses marges, elle se rabougrit comme peau de chagrin et surtout, les efforts que tout un chacun déploie pour la préserver a toutes les chances de le conduire à déserter encore un peu plus un espace public surveillé et sous contrôle. Souvent accusés d’accroître les dangers qui pèsent sur la vie privée, le Réseau peut pourtant au contraire être considéré comme un outil de « démocratisation de la vie privée », selon l’expression du même auteur [11]. C’est lui en particulier qui permet de rester en constamment en contact avec ses proches dans tous les lieux publics, que ce soit sur le lieu de travail, à l’école ou à l’hôpital. Il constitue dès lors un moyen de résistance à l’assujettissement que les pouvoirs de l’État ou de l’entreprise exercent sur les individus dans les lieux qu’ils contrôlent. Il est dès lors possible d’avancer que les comportements très différents de ceux de leurs aînés que les jeunes génération adoptent progressivement peuvent être vus comme le premier pas d’une reconquête d’un espace public qui a progressivement été abandonné.

On sait bien qu’historiquement, la construction d’un espace public démocratique s’est appuyé sur l’émergence de la notion de vie privée qui permet à l’individu de définir une liberté fondamentale à partir de laquelle il va pouvoir agir sur celui-ci. Il reste cependant qu’une conception sacralisée de la vie privée, conduisant à son hypertrophie en valeur sinon en fait, ne peut avoir pour conséquence que le retrait permanent des citoyens de la vie publique.

Tout à la préoccupation de protéger leur vie privée, ceux-ci délaissent le bien commun et les espaces partagés par l’ensemble de la société. Et ces espaces sont alors soumis à des forces hétéronomes qui les gouvernent par la force et l’arbitraire.

L’affaiblissement que nous constatons de la cloison étanche entre espace public et vie privée est certes lourde de menaces : la transparence totale de l’individu jusque dans son intimité est une menace d’aliénation absolue qui fait froid dans le dos. Elle est pourtant aussi porteuse d’espoir, les utilisateurs du réseau qui construisent des espaces publics qui leur sont propres, des réseaux autonomes de pair à pair, et qui les peuplent de leur subjectivité nous montrent sans doute qu’une reconquête est possible, qu’un réinvestissement citoyen de l’espace public, qu’il soit virtuel ou physique, est possible, mais que cette reconquête doit sans doute être payée par une mise en commun et une ouverture des subjectivités, des affects et même des corps dans ces espaces. En un mot, ils nous montrent qu’il est finalement nécessaire de surmonter ses propres pudeurs, de nourrir ses actes publics de sa propre subjectivité pour reprendre pied et reprendre le contrôle d’une société qui sans cela risque d’être gouverné par des pouvoirs désincarnés, c’est à dire mortels.

Une récente évolution du débat a mis en évidence l’apparition de la notion de « sousveillance » aux côtés de celle de « surveillance » [12]. L’idée implicite qui accompagne ces développements est que l’une n’est pas moins effrayante que l’autre ; que les « littles sisters » qui s’épient mutuellement, de pair à pair, ne représentent pas moins de danger que le « big brother » qui nous surveille d’en haut de son dispositif panoptique. La question mérite d’être posée sérieusement car les deux dispositifs ont pourtant des implications politiques très différentes. On peut évidemment souhaiter échapper à l’un et à l’autre. Mais est-ce possible ?

Notes

[1] Manach, Jean-Marc. “Les “petits cons” parlent aux “vieux cons” (la version courte).” Bug Brother. http://bugbrother.blog.lemonde.fr/2010/01/11/les-petits-cons-parlent-aux-vieux-cons-la-version-courte/.

[2] “Google’s Privacy.” Inside the mind of Google. CNBC, 2010. http://www.cnbc.com/id/15840232?video=1372176413&play=1.

[3] Mike Arrington interrogates Mark Zuckerberg, Mike Arrington interrogates Mark Zuckerberg techcrunch on USTREAM. The Web. Ustream, 2010. http://www.ustream.tv/recorded/3848950.

[4] Lenhart, Amanda. Teens and Sexting. Pew Internet & american life Project, Décembre 15, 2009. http://www.pewinternet.org/Reports/2009/Teens-and-Sexting.aspx.

[5] Manach, Jean-Marc. “La vie privée, un problème de vieux cons ?.” InternetActu.net, Mars 12, 2009. http://www.internetactu.net/2009/03/12/la-vie-privee-un-probleme-de-vieux-cons/.

[6] Manach, Jean-marc. “Vie privée : le point de vue des “petits cons”.” InternetActu.net, Janvier 4, 2010. http://www.internetactu.net/2010/01/04/vie-privee-le-point-de-vue-des-petits-cons/.

[7] Boyd, Danah. “Taken out of Context, American Teen Sociality in Networked Publics.” UC Berkeley, 2008. http://www.danah.org/papers/TakenOutOfContext.pdf.

[8] Turkle, Sherry. The Second Self : Computers and the Human Spirit, The MIT Press, 2005.

[9] Oram, Andy. “Being online : identity, anonymity, and all things in between.” O’Reilly Radar, Décembre 17, 2009. http://radar.oreilly.com/2009/12/online-identity1.html.

[10] Oram, Andy. “Being online : Your identity to advertisers—it’s not all about you.” O’Reilly Radar, Décembre 22, 2009. http://radar.oreilly.com/2009/12/online-identity4.html.

[11] Manach, Jean-Marc. “Une démocratisation de la vie privée ?.” InternetActu.net, Janvier 18, 2010. http://www.internetactu.net/2010/01/18/une-democratisation-de-la-vie-privee/.

[12] Ganascia, Jean-Gabriel. Voir et pouvoir : qui nous surveille ? Editions le Pommier, 2009.

» Article initialement publié sur Homo Numericus

» Illustration de page d’accueil par Jim Donnelly sur Flickr

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http://owni.fr/2010/02/01/vie-privee-sur-internet-etat-des-lieux-sur-un-debat-en-evolution/feed/ 7
Les « digital natives » la génération multi-écrans http://owni.fr/2009/10/30/les-%c2%ab-digital-natives-%c2%bb-la-generation-multi-ecrans/ http://owni.fr/2009/10/30/les-%c2%ab-digital-natives-%c2%bb-la-generation-multi-ecrans/#comments Fri, 30 Oct 2009 12:24:27 +0000 Philippe Martin http://owni.fr/?p=5032 Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette  vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là.

Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes.

Même s’ils sont très proches des « Y » en terme de consommation de produits numériques, leur comportement est déjà très marqué. Étant père de quatre garçons dont trois sont des « Y » dans la vingtaine, mon petit dernier qui a onze ans m’intrigue, me questionne et je suis en passe de me demander si nous ne sommes pas en présence du premier type d’espèce que l’on pourrait nommer « Homo numericus ». Puisque que j’ai la chance d’avoir un spécimen sous la main, voici quelques points et anecdotes tirés de mes observations:

- Mac ou pc: aucune importance pour lui. Il utilise aussi un  XO OLPC mais rarement car il ne peut y faire tout ce qu’il veut et y utiliser ses applications préférées. A noter qu’il n’imprime presque jamais.

- Courriel: Il ne l’utilise presque pas. La phrase qui tue: « le courriel c’est pour les vieux »

- Recherche sur Internet: il est capable de trouver tout ce dont il a besoin ce qui contredit certains experts qui décrivent les jeunes comme de mauvais utilisateurs des moteurs de recherche. Également dépendamment de ses besoins il ira soit sur Google, soit sur Wikipédia.

- Commerce électronique: il est déjà un consommateur en ligne. Je suis obligé de sortir ma carte de crédit pour faire des achats pour lui sur Internet.

- Sur le web: il est multi-tâche c’est à dire qu’il utilise plusieurs applications en même temps. Youtube pour les vidéos, son réseau social Chapatiz et Piczo plus MSN. Il passe de l’un à l’autre et communique en même temps avec plusieurs communautés.

- Le portable: c’est l’outil le plus important avec le laptop. Le SMS est très utilisé. A noter que je suis impréssioné par la rapidité d’exécution parfois sans regarder l’écran, l’emplacement des touches est connu par coeur.

- MSN: une des applications primordiales, plus de 105 amis, c’est la ligne directe avec sa communauté. J’ai remarqué aussi que l’écriture de style « langage chat » n’affecte pas l’écriture classique. Il fait très bien la différence.

- Blogs: il utilise Piczo et blogger. Il est capable de tout configurer seul. Je ne suis jamais intervenu pour l’aider, tous les conseils viennent des amis.

- Réseaux sociaux: Chapatiz et Piczo. Il choisi ceux où sont ses amis. Facebook est pour les « vieux » aussi.

- Musique: il télécharge un peu de musique sur Limewire mais sans abuser. Je ne suis pas trop favorable mais je me rends compte aussi que l’industrie est dépassée. Tous les jeunes le font. Je pense que la musique va devenir gratuite dans les prochaines années, d’ailleurs il me demande pourquoi la musique est gratuite à la radio et sur Youtube. Que lui répondre?

- Jeux vidéos: XBOX mais pas de façon addict. Il va s’ennuyer s’il ne joue pas avec des amis. Par contre World Of Warcraft est un must pour lui. On est dans le social gaming.

- Cinéma: le grand écran reste toujours une sortie appréciée pour les nouveautés avec force son et effets spéciaux.

- Télévision: les émissions sont triées sur le volet: match de hockey et de soccer live, émissions pour les jeunes ( Wrack TV ), reportages et documentaire ( Historia). La télé est un des écrans mais n’est plus le principal.

- L’école: aucune attente en ce qui concerne les TIC. Pour lui les enseignants sont largués sur ce dossier. Il me dit parfois s’ennuyer, que c’est long, que l’école n’avance pas assez. Il apprécie quand même beaucoup la bibliothèque et la lecture.

- Chicane:  parfois lors de manipulation sur l’ordinateur, j’ai tendance à vouloir intervenir pour lui montrer mais il me rembarre en me disant que je suis lent. Il est dans le « je sais ». Il a raison car il comprend beaucoup plus rapidement les fonctionnements. Petit conflit de génération.

Conclusion: vous allez me dire, oui mais toi tu bosses dans le web donc c’est normal qu’il soit à l’aise. En fait non, 95 % des choses qu’il apprend ou découvre viennent de ses amis, soit par le chat, soit par la cours de récréation. C’est la recommandation et le bouche à oreille. Comparativement à ses frères ainés ou j’ai eu des situations d’addiction aux jeux vidéos ou à la télé, avec lui c’est différent. Cela fait partie de sa vie, c’est naturel. Cela n’empiète pas sur d’autres activités que ce soit sportives ou sociales.

Si je regarde comment j’étais au même age, on parle de deux mondes. Jamais les enfants n’ont autant écrit qu’en dehors de l’école. Google earth est le meilleur livre de géographie qui éxiste et il peut le consulter à saciété. Il peut avoir des réponses à des questions instantanément et me reprends parfois. Aouch. Comme le dit Marc Prensky, nous les vieux sommes encore dans le controle de l’information car c’est le pouvoir. Eux sont dans le « être le premier à diffuser de l’information». Tout un paradigme.

Pistes: Webcom Montréal 2008: vidéo de l’entrevue de Marc Prensky

- Les digital natives, de Facebook au blogue chez Claude Malaison

- Is surfing the Internet altering your brain chez Yahoo ! Tech

- Les digital natives inventent le web qui leur ressemble chez Cluster 21

- Digital natives: ils vont bouleverser l’entreprise chez Le Monde Informatique

- Intégration au travail des nouvelles générations, au-delà de la nécessité, un atout chez Direction Informatique

» Article initialement publié sur N’ayez pas peur !

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