Nous allons donc bientôt profiter d’appareils plus astucieux, conformes à notre nouveau mode de vie, souvent social, mobile, contextualisé, personnalisé, « always on ».
Déjà, les lignes se brouillent entre nos vies « off » et « online » ! Notre environnement immédiat est branché 24/7! « D’ici quelques années, tout ce qui est connectable sera connecté », aime à dire le patron de Google, Eric Schmidt. L’Internet –désormais partie significative de nos existences– nous fait vivre en immersion dans les médias et l’échange d’informations, au sein d’un univers aussi présent autour de nous que l’électricité ou l’air que nous respirons. Le réseau est devenu un autre oxygène !
Une nouvelle fois, un environnement neuf se met en place. Comme d’habitude, les nouvelles technologies, toujours traversées par des accélérations foudroyantes, orientent nos usages et concernent quasiment tous les aspects de notre vie. Les ruptures et dislocations continuent d’accélérer, poursuivent le chamboulement des modèles économiques et vont souvent plus vite que nos possibilités d’adaptation.
De nombreux grands secteurs de nos sociétés sont concernés : les transports, la santé, l’éducation, la culture, les médias.
Et, de plus en plus numériques, ce sont justement les médias –l’ensemble des moyens de diffusion de l’information– qui sont les premiers concernés sur fond de surabondance de contenus disponibles – de plus en plus sous forme vidéo– pour des expériences toujours plus immédiates, mobiles, partagées et personnalisées.
Les écrans sont désormais partout au centre de nos usages médias. Avec le basculement général vers l’Internet devenu ubiquitaire, l’essor extraordinaire des smartphones, du Wi-Fi, du streaming, et l’arrivée prochaine du très haut débit associé au déjà très répandu « cloud computing » et à une multitude de capteurs, nous vivons dès aujourd’hui de nouvelles expériences informatives, éducatives et de divertissement, à la maison, au bureau et en déplacement ! Les manières de jouer et d’apprendre changent. Nous avons d’ores et déjà à notre disposition davantage d’informations que toutes les autres générations précédentes réunies ! Avec un fait nouveau majeur : l’accès permanent à la connaissance, au jeu, au divertissement, devient plus important que sa possession. Et comme toujours avec le numérique, le public peut aller directement à la source ! D’où le succès de Netflix aux Etats-Unis pour la vidéo, ou de Spotify en Europe pour la musique. Aujourd’hui, numérique signifie immédiat, personnalisé, portable, infini. Demain, un livre, un disque, un film ne seront plus que des URL !
Mais, pour ce public multiconnecté, si la possession devient moins importante, la personnalisation, le sur-mesure, jouent, eux, un rôle de plus en plus grand dans des expériences médias qui remplacent la simple consommation de contenus. Chacun y travaille et les changements se déroulent sous nos yeux à grande vitesse.
Les jeunes, quand ils ne dorment pas, sont en ligne et ne s’informent plus que par Internet, le média sur lequel où ils passent le plus de temps.
Les smartphones se vendent déjà mieux que les ordinateurs et commencent à mordre sur le marché des appareils photos et caméras, qui, s’ils ne sont pas connectés sont aussi inutiles que du film argentique. Les tablettes, qui n’existaient pas il y a un an, sont devenues un maillon majeur de la convergence et se multiplient comme des petits pains.
Les ventes de livre numériques, téléchargeables à distance, ont triplé en un an aux Etats-Unis où leurs ventes viennent de dépasser – palier symbolique—toutes les catégories de livres imprimés. Pendant que même les grandes chaînes de librairie font faillite, le rêve de l’encyclopédiste de transporter avec soi tout son savoir, est réalisé.
La télévision résiste bien, demeure le média dominant, mais n’est plus un univers stable : elle ne se regarde pas comme avant, ni au même moment, et souvent en accompagnement d’autres activités. Sa force est augmentée par l’Internet, notamment via les réseaux sociaux. Certains Américains commencent à se désabonner du câble, d’autres, plus jeunes, n’y auront jamais recours. Les internautes téléchargent de moins en moins et consomment de plus en plus en streaming. Les jeux vidéo en ligne, si possible adossés aux réseaux sociaux, prospèrent et réussissent à capter l’attention des jeunes.
L’informatique dans les nuages (cloud) est de plus en plus utilisée comme lieu de stockage dématérialisé, voire d’accès à des contenus (non sans risques sur leur pérennité). C’est presque déjà devenu notre disque dur.
Le dégroupage des médias se poursuit à proportion de leur perte de contrôle sur les moyens de distribuer des contenus. Avec Internet, et grâce au haut débit généralisé, tous les médias fusionnent. Pour les natifs numériques, ce qui compte c’est le message, pas l’outil. Peu importe aujourd’hui qu’il soit sous forme photo, vidéo, son ou texte. Peu importe aussi qu’il émane de professionnels ou d’amateurs.
Les contenus des médias doivent être là où est leur audience. La publicité en est le premier témoin : franchissant un nouveau palier, aux Etats-Unis, l’Internet a dépassé en 2010, pour la première fois, les journaux comme support des annonceurs. Il ne reste plus que la télévision à détrôner !
Les médias physiques disparaissent petit à petit. Songez aux cassettes, disquettes, CD, DVD ! Même les clés USB sont encombrantes à l’heure du « cloud » !
L’« Homo Connectus » tient désormais pour acquis de pouvoir profiter des contenus où qu’il se trouve et sur tous ses écrans qui fusionnent. On l’a dit : Il ne télécharge plus mais profite des contenus en streaming. Encore une fois, c’est leur accès permanent qui compte. Internet se fond en de multiples écrans.
Ordinateurs, télévisions, smartphones, tablettes, vont ainsi se synchroniser pour déboucher sur une expérience d’utilisation homogène à la maison, au bureau et en déplacement. Les constructeurs travaillent beaucoup au transfert sans peine, sans frictions, des contenus entre tablettes et téléviseurs. Nous regarderons une émission chez nous le matin, la suivrons en mobilité avant de la retrouver au bureau. L’accès aux expériences vidéo se fera de plus en plus en mobilité.
Plusieurs progrès techniques associés vont permettre ce débordement d’expériences connectées d’un support à l’autre : le développement des GPS, la connectivité de nos environnements physiques, l’Internet embarqué, la puissance informatique croissante, le recours au « cloud computing », le web social, les effets cumulés du réseau, la miniaturisation, la baisse des prix et la multiplication des capteurs, qui se conjuguent pour rendre les appareils plus « intelligents », davantage capables de rendre des services par l’exploitation croissante de données, pour le compte de l’utilisateur et dans différents secteurs de nos vies quotidiennes. Dès cette année, le nombre d’appareils connectés va dépasser celui des ordinateurs. Le wi-fi va arriver dans les voitures. Et les industriels du secteur portent leurs efforts sur le marché grand public, devenu plus intéressant que celui des entreprises.
Après la révolution des écrans tactiles, la reconnaissance vocale et des visages, et l’essor des applications en réalité augmentée deviendront des éléments de notre cadre de vie numérique. Demain après le cinéma, la 3D, l’image en relief, s’imposera sur tous les écrans, y compris smartphones et tablettes ; elle modifiera encore notre expérience avec le numérique. Et sans lunettes !
Bientôt, les nouveaux appareils intelligents pourront deviner et anticiper sur nos souhaits en fonction de nos habitudes, de notre lieu, de l’heure et du jour de la semaine, de nos relations. Rappelez-vous : ils en savent déjà beaucoup sur vous !
Aujourd’hui, élément essentiel de notre nouvelle vie connectée, le smartphone, grâce à sa connectivité, sa mobilité et sa personnalisation, est devenu notre compagnon permanent, le principal canal d’informations ouvert, le lien vers le monde, le lieu des notifications, notre chaîne personnelle de divertissements, presque une partie de notre identité. Près d’un demi-milliard de personnes dans le monde profitent déjà d’un accès Internet vraiment mobile.
Au point qu’il n’est plus rare et –- bizarrement presque admis— de voir nos commensaux discourtois les consulter sans gêne, voire d’y tapoter un SMS ou deux. Rappelez-vous, il y a peu encore, nos téléphones mobiles restaient collés à l’oreille. Puis, nous nous sommes mis à les regarder (pour y lire – souvent en marchant– nos mails ou consulter des données), à les effleurer ou les caresser grâce à leur nouvelle techno tactile ! Aujourd’hui, l’appareil qui prend le plus de photos est notre téléphone ! Demain, nous les pointerons vers un paysage, un tableau, un restaurant, un cinéma, pour avoir plus d’infos, car, par la réalité augmentée, ils voient bien plus de choses que nous !
Sous peu, chacun aura un smartphone ou une tablette. La création par Apple d’un nouvel usage (accès par écran portatif à tout ce qui est écrit, joué, radio et télédiffusé) et qui n’existait pas il y a un an, provoque l’arrivée de très nombreux concurrents de l’iPad. L’attrait de la tablette est extraordinaire et son utilisation surprenante : le public ne sait toujours pas trop pourquoi il l’achète, s’en sert plutôt à la maison et à plusieurs !
Après avoir chahuté, déstabilisé les industries de la musique, de la presse, de l’édition, de la publicité, des telcos, l’Internet vient envahir le monde de la télévision.
D’ici 5 ans, la plupart des téléviseurs seront connectés. Le téléviseur s’ouvre au web et ne sera plus à sens unique. Impossible pour l’instant d’en saisir tous les effets. Mais une chose est sûre, le téléspectateur obtiendra ce qu’il voudra y trouver, d’une manière ou d’une autre … Là encore une économie de la rareté est sur le point d’être submergée par une économie de l’abondance et de … l’ubiquité. Comme dans la presse, une nouvelle logique de la demande va l’emporter sur celle de l’offre, plus banale, moins puissante.
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Inversement, la télévision et la vidéo vont influencer l’Internet : plus de 80% de son trafic sera composé de vidéos dans quelques années. Mais le réseau partout pour de la vidéo a un coût qui n’est pas encore dans les modèles économiques actuels. La possible fin de l’Internet en accès illimité forfaitisé se profile et avec elle des menaces importantes sur la neutralité du net et donc sur des libertés publiques et fondamentales, comme le droit d’expression et l’accès à l’information et à la connaissance.
Chaque jour un peu plus, Internet devient un média audiovisuel ! Après un web d’outils (search, comparatifs, cartes, wikis, annuaires …), puis un Web de communication (email, messagerie, réseaux sociaux, téléphone sous IP), le nouvel Internet pourrait bien être celui du divertissement et des loisirs … de qualité (vidéos, musique, lecture enrichie, jeux …).
Renforcée par la mobilité et les réseaux sociaux, de plus en plus utilisés en parallèle, la télévision reste le média dominant. Le public ne se contente plus de la regarder, chez lui ou en déplacement, il en parle, via SMS, email, Twitter ou Facebook. La dimension sociale, qui a toujours fait partie intégrante de l’expérience télévisuelle – on la regarde rarement seul–, est renforcée par les nouveaux outils. Elle devient sociale.
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Mais la télévision se consomme aussi de plus en plus à la demande, pendant que les chaînes traditionnelles perdent progressivement le monopole du téléviseur et ont peur de voir l’audience, et donc la valeur, partir ailleurs. Avec leurs nouveaux magasins d’applications embarquées, les fabricants rêvent d’en faire un grand iPhone horizontal dans le salon. Les chaînes redoutent, elles, la fragmentation de l’offre, le recul de leur rôle d’agrégateur et de prescripteur d’une offre organisée ou, pire, de n’être plus qu’une application parmi 1.000 autres, coincées entre celle d’Angry Birds et de la SNCF. La lutte pour être sur le premier écran, la porte d’entrée, sera rude ! Il leur faudra surtout travailler dur sur la relation unique qui les lie à leur audience pour répondre à cette « délinéarisation » de leurs contenus.
Les chaînes misent beaucoup sur l’aspect fédérateur des grands événements, du direct, de leurs animateurs, et sur la qualité de leurs contenus.
A coup sûr, Internet va modifier la perception que nous avons de la télévision et de la vidéo, créant de nouvelles habitudes et des demandes inédites. La bataille entre l’engagement (« lean forward »), propre au PC, et le divertissement (« lean back »), lié à la télévision, n’est pas terminée ! Avant que l’expérience télévisuelle ne s’écoule sans rupture d’un écran personnel à l’autre, la bagarre entre les nouveaux entrants disruptifs et les dinosaures cathodiques expérimentés va être rude d’ici 2015.
Le niveau d’expérience comme la simplicité d’usage seront les facteurs clés d’adoption. Personne ne veut plus gérer ses câbles et ses multiples boîtiers à la maison. La télécommande –2ème vrai écran important – et les guides de programmes devront aussi se simplifier pour faire face à la paralysie née de l’hyper choix et aider à la découverte visuelle. Le « search » et la recommandation, au cœur des nouveaux médias, joueront, là aussi, un rôle considérable.
L’ère du multi-écrans va dominer. Comment alors continuer à gérer des restrictions sur la télévision qui n’existent pas sur le PC ? Quelque soient les murs qui seront mis autour des expériences, le public, aujourd’hui en position de force, saura trouver, sélectionner, et consommer les œuvres comme il le désirera, sur l’écran de son choix et au moment voulu. Et gageons que plus leur accès sera facilité, moins il y aura de piratage.
Mais dans un tel foisonnement technologique, qui répond au formidable essor des usages numériques, les médias traditionnels d’informations, plus liés à la création de contenus bruts qu’à la fabrication d’expériences sophistiquées, semblent perdre la maîtrise de leur destin.
L’accélération de la désintermédiation et de la complexité technique les fait progressivement lâcher prise. De plus en plus de nouveaux acteurs (développeurs de logiciels, agrégateurs de contenus, fabricants de matériels)
viennent s’intercaler entre eux, leurs audiences et leurs annonceurs; contrôler l’accès au public et se servir au passage. L’exploitation des données des utilisateurs, nouveau nerf de la guerre, leur échappe de plus en plus. L’eldorado du marketing comportemental et personnalisé risque bien de profiter à d’autres. La publicité est aussi en train de se réinventer et cherche comment tirer parti des nouveaux supports connectés, notamment la « social TV ». Et pourtant il faudra bien continuer à financer des médias producteurs d’informations.
Les nouveaux médias sociaux, plateformes de création, collecte et partage d’informations, n’en sont qu’à leur début. Déjà règne la co-création distribuée, le partage massif et jubilatoire ! Les gens disent et écrivent ce qu’ils savent, sont de plus en plus impliqués dans la création, chaque jour plus aisée, de contenus photos et vidéos.
Le public aime ces médias de découverte de contenus inattendus, portés par le flux du temps réel, émanant de sources et filtres auxquels il a accordé sa confiance (amis, proches, experts, personnes admirées, etc …). Car ces réseaux sont surtout devenus d’influence, aidant à trier, à réduire le bruit d’Internet ! La curation, sorte d’édition partagée, règne. Les gens ne consultent plus les nouvelles, mais leurs nouvelles, leurs informations. Là où ils veulent, quand ils veulent et sous la forme qu’ils veulent.
Facebook, qui domine en Amérique et en Europe (22 millions d’utilisateurs en France) est l’endroit où nous passons le plus de temps, et en sait de plus en plus sur nous. Même Google est contraint d’imiter le fameux « Like button » qui organise, depuis un an, la socialisation de ses utilisateurs. Twitter est devenu une agence de presse mondialisée et personnalisée en temps réel.
La grande majorité des moins de 35 ans aujourd’hui se sentent au moins aussi bien informés par les réseaux sociaux que par les médias traditionnels. D’ailleurs,
la recommandation via les réseaux sociaux – le bon vieux bouche à oreille version “geek” – est devenu une source de trafic importante pour les sites d’informations.
Dans ces derniers, le journaliste assure une médiation professionnelle désormais tournée davantage vers la transformation que la génération d’informations. Son tri, sa sélection, sa vérification et sa hiérarchisation des nouvelles et des témoignages comptent plus que sa propre production.
Sur le terrain, les pratiques changent aussi : les photographes se retrouvent face aux journalistes de radio et de télévision. Chacun utilise les outils de l’autre dans une nouvelle orchestration éditoriale. Des JRI gagnent des prix de journalisme vidéo pour des sujets réalisés avec des appareils photos ! Les frontières sautent les unes après les autres. Il faut désormais adapter le sujet au média. La narration n’est plus linéaire.
Du texte à la vidéo, en passant par l’email, le SMS, les écritures changent aussi et deviennent plus visuelles, plus « fun », pour profiter des opportunités des nouvelles plateformes interconnectées. Le web, plate-forme convergente, permet d’accueillir tous les formats, souvent jusqu’ici cloisonnés, pour inventer un nouveau langage, de nouvelles écritures, de nouvelles formes de représentation.
Une nouvelle représentation du monde par l’exploitation visuelle des données se développe. Dans la course à l’attention, la visualisation de l’information aide à la compréhension de situations complexes. L’un des grands défis des rédactions, qui doivent aussi parler de plus en plus à l’intelligence visuelle du public, est aujourd’hui d’apprendre à travailler étroitement avec les designers, graphistes, statisticiens, développeurs pour enrichir l’information. Là aussi les barrières traditionnelles sautent, notamment dans l’illustration, favorisant un travail collectif. Cet habillage de l’information favorise l’immersion dans les sujets traités.
C’est aussi l’une des caractéristiques des « serious games ». En plein boom, le jeu en ligne et collaboratif, le plus souvent sérieux, bientôt en 3D, devient un élément central de l’engagement et de la fidélité des audiences. Les designers de jeux vidéo sont devenus les nouveaux experts de l’immersion et la fidélité de l’audience. Le couple Zynga/Facebook attire plus de 200 millions de joueurs chaque mois. Nombreux sont ceux qui se demandent comment profiter de ces nouvelles expertises dans l’éducation, la vie civique, la santé, mais aussi la fiction et l’information.
Des points d’entrée multiples et des formes d’interactions et de navigation inédites sont proposés dans de nouvelles formes narratives. L’audience s’est familiarisée, ces dernières années, avec d’autres formes de contenus que l’article ou le JT ! Personne n’a encore trouvé le bon modèle de narration entre le web et la télévision. Mais nous ne sommes qu’au début de cette histoire. Il faut favoriser la démarche de création pour faite naître des savoir-faire, puis une industrie. Internet est bien aujourd’hui un des endroits les plus créatifs du monde.
Introduction au Cahier de Tendances médias de France Télévisions / Printemps- Eté 2011 publié initialement sur Meta-Media
Images FlickR CC The unnamed et SimonQ錫濛譙
]]>C’était un peu le salon de la reprise. Le nombre de visiteurs aurait atteint environ 140.000 personnes, alors qu’il était descendu à moins de 110.000 en 2008, puis remontait lentement la pente depuis. Cela se voyait dans les allées, dans les conférences de presse, et même dans le trafic routier très congestionné de Las Vegas. Le salon est plein d’innovations mais, comme d’habitude, on n’y découvre pas d’innovations de rupture. L’innovation est un processus graduel, permanent. Avec des soubresauts, des phénomènes d’expansion ou de reflux. C’est un peu ce que l’on pouvait observer au CES cette année concernant la 3D, les télévisions connectées, les interfaces utilisateurs, tout comme avec les tablettes et mobiles. La paradoxe du “rien de vraiment nouveau” couplé à “plein de nouveautés” !
La vidéo 3D était mise en valeur par l’ensemble des constructeurs qui veulent pousser très proactivement leurs nouvelles offres associées auprès des consommateurs. Cela concerne évidemment les écrans, mais aussi les sources (lecteurs Blu-ray, set-top-boxes) tout comme les moyens de capture qui se multiplient pour le grand public avec de nombreuses caméras (Sony, Panasonic, JVC, etc.) et quelques appareils photo qui fonctionnent en 3D (notamment chez Sony).
Du côté de l’affichage, le débat fait rage sur les mérites respectifs des lunettes actives et passives, j’y reviendrai dans le rapport. On trouve des solutions d’affichage sans lunettes dites “auto stéréoscopiques” mais elles sont toujours très moyennes. Il faut dire que c’est un problème technique assez difficile – voire impossible – à résoudre. On se console donc avec des lunettes 3D stylées que l’on peut trouver chez Samsung, LG Electronics, tout comme chez une myriade de sociétés plus spécialisées, dont, surprise, Polaroid qui en lançait une paire conçue par Lady Gaga, venue sur leur stand et attirant une foule considérable.
La grande nouvelle du CES 2011, c’est que Google TV n’est plus l’épouvantail de l’industrie qu’il incarnait depuis son lancement en avril 2010. Tout du moins, pour l’instant. À la fois parce que quasiment aucune solution nouvelle le mettant en œuvre n’était annoncée (à part Samsung qui présentait en catimini un boitier “over the top” et un lecteur Blu-ray sous Google TV), Google ayant demandé à ses partenaires constructeurs de repousser leurs annonces. Mais aussi parce que la solution est pour l’instant assez décevante à l’usage, tout du moins lorsque l’on souhaite consommer de la télévision “à l’ancienne” et pas juste sur YouTube. J’ai pu le constater chez Sony, Logitech et Dish Network, les trois stands où Google TV était exploitable.
En conséquence de quoi, on pouvait observer les TV connectées qui continuent de s‘améliorer “en silo” chez les grands et petits constructeurs, comme chez LG Electronics dont la LG SmartTV semble être une des plus abouties de ces solutions (ci-dessous).
J’ai pu également regarder de près l’offre IPTV multi-écrans de Verizon (FiOS) qui a l’air d’être assez complète, avec les chaines des grands networks disponibles en streaming live sur iPad et autres écrans mobiles. Comme quoi, à l’instar de nos FAI en France, les opérateurs télécoms ont encore leur rôle à jouer dans les TV connectées.
Comment piloter sa TV ou sa set-top-box, tout comme ses consoles de jeu ? Les commandes gestuelles étaient très présentes sur le salon. Résultat de l’effet “Kinect”, la solution de Microsoft pour la XBOX 360 qui s’est vendue à 8 millions d’exemplaires en deux mois, un record dans la sortie d’un nouveau produit grand public. Derrière ces solutions, on trouve des fournisseurs de technologies comme l’israélien PrimeSense à l’origine de Kinect et qui licencie à tour de bras sa technologie de chipset et son reference design, notamment chez Asus (ci-dessous). Vous risquez donc de la voir apparaitre un peu partout. Sans compter les technologies des concurrents de Prime Sense qui utilisent le “Time of Flight” pour détecter les mouvements (nous y reviendrons…).
On trouvait aussi sur le salon un très grand nombre de petits claviers sans fil. Beaucoup plus que les années précédentes. Que ce soit pour s’interfacer avec une tablette, un smartphone ou un PC media center.
Je ne vous apprendrai rien en vous indiquant que l’on trouvait plein de tablettes au CES.
La plupart étaient sous Android et notamment dans la version Honeycomb qui supporte bien les interfaces tactiles. On en trouvait autant chez les grandes marques (Samsung, LG, Panasonic, Acer, Asus, etc.) que chez les sociétés chinoises qui les fabriquent en standard (OEM) ou sur mesure (ODM). À ceci près que les tablettes bas de gamme sont en général équipées de processeurs bas prix anémiques. Il faut s’en méfier.
Un phénomène intéressant : la frontière entre smartphones et tablettes voire netbooks s’amenuise. Il est incarné par l’Atrix de Motorola, son nouveau smartphone sous Android qui présente la particularité d’être associable à une docking station en forme de netbook très plat (ci-dessous). C’est très séduisant comme concept.
On trouvait aussi des tablettes sous Windows avec ou sans clavier, notamment chez Dell, Samsung et Asus. Peut-être un revival des “Tablet PC” qui n’ont jamais vraiment percé sur le marché.
Côté ebooks, j’ai été surtout bluffé par l’écran e-paper en couleur Mirasol de Qualcomm (ci-contre), présenté pour la première fois au CES. On attend toujours les ebooks qui en seront équipés. La production de ces écrans, pour l’instant au format 7 pouces, aurait déjà démarré donc cela ne devrait pas tarder.
Les constructeurs d’ebooks se différencient maintenant plutôt dans les offres de contenus que dans leur matériel, tellement ils sont standardisés autour des écrans provenant d’e-ink.
Le phénomène est très marquant. On trouve Android mis à toutes les sauces : dans les tablettes, dans les smartphones, dans certains netbooks, dans les TV et certaines set-top-boxes et même dans les autoradios. Sa gratuité n’y est pas pour rien. Mais peu d’appareils sont certifiés Google et chacun a son propre “Application Store”. Je vous explique pourquoi dans mon rapport CES 2011.
Ce salon marquait aussi la montée en puissance de la 4G dans la mobilité. Elle est poussée par les opérateurs (Verizon, Sprint, etc) comme par les constructeurs (Samsung, LG, etc). Avec des déploiements qui vont varier d’un pays à l’autre. On pouvait cependant noter l’absence d’AT&T sur le salon.
Un grand nombre des innovations évoquées ont comme origine les évolutions des processeurs embarqués. Leur rôle est critique et je vais le décrypter dans mon rapport.
On trouvait au CES des sociétés comme Intel mais aussi Qualcomm, Broadcom, ST Microelectronics, Marvell, Atheros, qui ont toutes des offres intéressantes. Qualcomm, encore lui, propose maintenant son System On Chip Snapdragon en version bi-coeur, que l’on retrouvait dans divers smartphones. Idem dans la TV, où les Atom Sodaville et Groveland (Intel), le 7225 de Broadcom et le 7108 de ST Microelectronics rendent possibles la création des set-top-boxes de la nouvelle génération.
Le rôle de ces processeurs embarqués est tel que Microsoft a annoncé au début du salon le support de certains d’entre eux, notamment sur architecture ARM, dans la prochaine version 8 de Windows.
Il faut aussi noter le rôle tout aussi critique des capteurs : gyroscopes, GPS, accéléromètres, capteurs de pression, de luminosité, qui s’intègrent dans tous ces objets numériques. Ces nouveaux capteurs sont notamment utilisés dans un tas de solutions dédiées à la santé, assez nombreuses sur le salon.
J’ai même vu un nanocomposant de spectrographie qui pourrait servir à améliorer le calcul automatique de la balance des blancs dans les appareils photos.
Le « crapstore » est un diminutif décrivant la variété de ces gadgets matériels qui complètent les produits Apple. On en trouve une quantité toujours incommensurable, avec la nouveauté de l’iPad à laquelle tout “l’after market” s’est adapté en juste quelques mois.
Il y a bien entendu plein de trucs classiques sans grand intérêt (les pochettes en cuir, les coques en couleur, les stations d’accueil) mais d’autres gadgets peuvent être plein d’ingéniosité ou surprendre. Il en va ainsi de ce système de karaoké pour iPad (ci-dessous). La liste est très longue et vous aurez droit à un reportage photo complet de ces gadgets dans le Rapport CES.
Il y avait beaucoup de Français au CES 2011, autant visiteurs qu’exposants. J’ai découvert pas mal de sociétés françaises qui exposaient pour la première fois, sans compter les Français qui dirigent des PME innovantes à l’étranger (USA, Hong-Kong). Mon inventaire des sociétés françaises exposant bat des records depuis que je visite le CES (2006). C’est un signal très encourageant du dynamisme de nos PME innovantes.
Parrot est l’une d’entre elles et est bien connue pour exploiter le CES pour ses grands lancements. La société a encore marqué des points avec le lancement de son autoradio sous Android, l’Asteroid (ci-dessous).
Voilà pour commencer. Ce salon reste un émerveillement tellement on y croise de nouveautés, même si elles ne sont pas radicales. Les usages numériques sont infinis, les combinatoires illimitées. Il faut juste savoir conserver le regard d’un enfant émerveillé lorsque l’on visite le salon. Sans compter cette folle ville qu’est Las Vegas.
Le rapport exploite une base de 4.400 photos, 190 vidéos et 120 Go de contenus à trier, captés avec mon Canon 5D Mark II. Du pain sur la planche ! Vous pouvez télécharger le rapport de Olivier Ezratty :
Vous pouvez aussi regarder les interviews sous Skype réalisées avec notre ami à tous Jean-Michel Billaut pendant toute la durée du salon (Day 1, Day 2, Day 3, Day 4 et Day 5) !
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Article initialement publié sur le blog Opinions Libre
>> photos de Olivier Ezratty / image de clé CC TechCocktail
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