En ligne, les médias français sont des nains publicitaires

Le 12 mai 2010

A l'inverse des géants du Net, la publicité occupe une place famélique dans le financement des médias français. Selon David Pergy de Precepta, cela doit amener ces derniers à repenser leurs offres et forger de nouveaux modèles.

Douche froide pour les éditeurs cet après-midi au Geste (Groupement des Éditeurs de Services en Ligne), à Paris, à l’écoute des résultats de l’étude Precepta sur les business models des médias en ligne français. Même si la plupart savaient à quoi s’en tenir.

Des revenus publicitaires atrophiés

D’abord ce chiffre inquiétant : leurs revenus web n’ont représenté l’an dernier que 2,8% du chiffre d’affaires total des médias français (410 millions d’euros sur 14,3 milliards).

On est loin des 10% espérés il y a encore quelques années ou des 20% annoncés aujourd’hui par certains…

Après des progressions de 30% par an depuis 2000, leur chiffre d’affaires en ligne a même reculé de 6% en 2009.

Et les perspectives ne sont pas bonnes, selon ce cabinet d’études : après un rebond technique du marché publicitaire (+4%) dans son ensemble attendu en 2010, il s’attend à un ralentissement assez franc en 2011 (+0,5%). “Et même à des chiffres pires si des politique de rigueur se mettent en place”. En ligne, Precepta table sur une progression de 8% en 2010 comme en 2011.

Ces menaces sur la publicité sont liées notamment à la croissance faible du marché depuis 2001 et à la lutte pour les parts de marché qui va croître avec l’arrivée des réseaux sociaux et des plate- formes vidéos.

À défaut de volumes de revenus sur le web, la rentabilité est-elle au rendez vous ?

Même pas“, répond David Targy de Precepta. Pire, elle a reculé depuis 2007, constituant une déception pour un modèle que l’on croyait à coûts fixes.

Car en fait les coûts progressent avec l’activité : ceux des salaires, de l’évolution des sites (web 2.0, vidéo, iPhones…), de leur complexité croissante et de l’acquisition d’audience. À noter les exceptions des plus grands pure players comme AuFeminin.com, Doctissimo et AlloCiné, qui exploitent des rentes de situation, fonctionnent en “low costs” et dégagent la meilleure rentabilité.

Inventer de nouveaux modèles

Precepta en conclut que les médias en ligne doivent sortir du modèle “publicité/audience” car la pub n’est pas viable (sauf pour des hauts niveaux d’audience conjugués à des fréquentation récurrentes). D’autant que la pub bannière (display), source de financement principal des médias en ligne perd des parts de marché (17,3% aujourd’hui contre 35% en 2003) et a reculé de 6% en 2009, alors que les liens sponsorisés (Google) ont augmenté de 10%.

Les pistes à suivre, pour Precepta, passent par l’enrichissement de l’offre des médias, la création de nouvelles valeurs ajoutées, des modèles payants freemium, l’exploitation de ressources différentes ou de compétences rares, le recours aux donations, voire aux subventions. Elles passent aussi par une meilleure valorisation de l’existant pour les annonceurs, des diversifications thématiques et l’exploitation des débouchés mobiles. Enfin, des solutions collectives devraient être tentées pour créer des rapports de force différents.

En matière de revenus en ligne, “les sites médias français sont des nains publicitaires sur Internet” face aux géants du web (Google, PagesJaunes, Yahoo, MSN ou Orange).

Les principaux groupes de médias, souligne Targy, tournent autour de 15 à 20 millions d’euros de chiffre d’affaires web, soit soixante fois moins que Google en France. À eux tous, les médias français, reçoivent trois fois moins que l’ensemble des grands agrégateurs et deux fois moins que le seul Google.

Aujourd’hui la répartition des revenus des médias en ligne est la suivante : 63% vient de la pub, 18% des contenus payants, 6% du B2B et syndication et 5% de l’e-commerce.

Attention toutefois : Precepta a aussi dit aujourd’hui clairement que les différentes mesures d’audience en France étaient “incohérentes” et “peu crédibles“.

Billet originalement publié sur AFP-Mediawatch

Crédits Photos CC Flickr : timtom.

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